Seulgi Lee, « LE PLUS TÔT C’EST DEUX JOURS MIEUX » - Ressources pédagogiques

Seulgi Lee, vue de l'exposition « LE PLUS TÔT C'EST DEUX JOURS MIEUX », 2019 © Benoît Mauras

Biographie

Seulgi Lee
née en 1972 à Séoul, Corée du Sud
vit et travaille à Bagnolet, France

seulgilee.org
représentée par la galerie Jousse Entreprise

Seulgi Lee travaille depuis plusieurs année en étroite collaboration avec des artisans, dans une tentative de rendre visible le lien entre l’artisanat et la culture orale. Après avoir travaillé la performance, elle se définit aujourd’hui plutôt en tant que sculpteure. Elle accorde grande attention à l’espace et réinterprète les savoir-faire et pratiques traditionnelles, en collaboration avec des artisans locaux de différentes régions du monde (Corée, Maroc, Mexique, etc.). Seulgi Lee puise autant son inspiration dans l’anthropologie, l’archéologie, la sociologie que dans l’oralité, à travers les récits populaires. Elle tente de revenir aux origines du langage, en menant des recherches sur la transmission des savoirs. Ses rencontres l’amènent à réinterroger le rapport aux gestes, au corps, aux matériaux, à l’environnement et à dépasser les frontières  entre art/ artisanat, tradition/ modernité, local/ global.

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LE PLUS TÔT C’EST DEUX JOURS MIEUX
Œuvres exposées

U : Mots coulent comme de l’eau, rampent comme un insecte. = Rumeur.
U : 유언비어 (流言蜚語). Yu-eon-bi-eo.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2019
production : La Criée centre d’art contemporain, Rennes
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : Même la sandale en paille trouve sa paire. = Une âme soeur existe pour chacun·e.
U : 짚신도 짝이 있다. Jip-sin-do Jjag-i It-da.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2017
courtesy galerie Jousse Entreprise, Paris

U : Une grenouille au fond d’un puits. = Esprit étroit.
U : 우물 안 개구리 (井中之蛙). Ou-moul An Gyegu-ri.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2018
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : Réparer l’étable après avoir perdu la vache. = Trop tard.
U : 소 잃고 외양간 고친다 (亡牛補牢). So Il-ko Wae-yang-kan Go-tchin-da.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2018
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : Mon nez est long de trois pieds. = J’ai tellement de problèmes que je ne peux pas prendre soin des autres.
U : 내 코가 석자 (吾鼻三尺). Ne Ko-ga Seok-ja.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2018
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : Lécher l’extérieur de la pastèque. = Bâcler.
U : 수박겉핥기. Su-bak-keul-hal-ki.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2014
courtesy The National Gallery of Victoria, Melbourne

KUNDARI araignée
Structure tubulaire avec cinq cercles
150 x 124 x 151 cm, 2019
collaboration avec Brice Oziel, Montreuil-sur-Ille
production : La Criée centre d’art contemporain, Rennes
courtesy galerie Jousse Entreprise, Paris

KUNDARI abeille
Structure tubulaire avec un cercle et un triangle
122 x 202 x 106 cm, 2019
collaboration avec François Lunardi, Paris
production : Centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc, Thouars
courtesy galerie Jousse Entreprise, Paris


CHUM
papier coréen, métal
60 x 123 x 25 cm, 2019
collaboration avec Youngchul Kim, le chaman pour Guimé, île Jéju
et Yunju Chang, curator de Wooran Fdn.
production : Wooran Foundation, Séoul

SEOLOUI GA
papier coréen, 40 x 450 cm chaque, 2019
collaboration avec Jaesun Lee et Changmi Kang, les chamans de Seoloui, mont Gyeryong et Yunju Chang, curator de Wooran Foundation.
production de l’artiste avec la coordination de Wooran Foundation, Séoul

كورْشم MACHRUK
terre cuite et bois peint, 70 x 95 x 40 cm, 2018-2019
collaboration avec Aïcha Lakhal, Ain Bouchrik du Rif, Maroc
production L’Appartement 22, Rabat

W / Jeune fille bien coiffée.
W / Sa2 la2 kwa2shu1ngu2 la2 shhñ1 itzie ske2.
feuilles de palmier, laiton, 100 x 111 x 23 cm, 2017
collaboration avec la coopérative des vannières Xula, Santa Maria Ixcatlan, Mexique
courtesy de la galerie Jousse Entreprise, Paris

ÎLE AUX FEMMES
film, 15 min, 2019
collaboration avec Anne-Laure Vincent et Clémence Mimault
image et montage Pierre-Philippe Toufektchan
production La Criée centre d’art contemporain, Rennes

DEPATTURE
film, 25 min, 2019
image et montage : Pierre-Philippe Toufektchan
production centre d’art la chapelle Jeanne d’Arc, Thouars
courtesy des galeries Jousse Entreprise, Paris et Gallery Hyundai, Séoul

 

Seulgi Lee, l'Atelier A

Pêle-mêle autour de l’exposition Le plus tôt c’est deux jours mieux de Seulgi Lee

Les outils « pêle-mêle » sont conçus spécialement pour chacune des expositions.
Ce sont des activateurs de rencontre avec les œuvres. Ils prennent différentes forme : jeu de piste, jeu de plateau ou jeu de cartes, ils permettent d’ouvrir le regard, de jouer et d’échanger autour de la démarche des artistes.

Cartes à télécharger, imprimer et colorier !
Avec cette série de six cartes à colorier, jouons avec les couleurs des couvertures Nubi de l’ensemble U et découvrons les proverbes associés à chaque couverture !

 

Pêle mêle d’images autour des œuvres

Le papier hanji

Comme son nom l’indique (han signifiant « Corée » et ji, « papier »), le hanji est un papier coréen, fabriqué de manière traditionnelle, principalement à partir de fibres d’écorce interne de mûrier. Cette technique de papier est très ancienne, puisque le papier hanji serait apparu dès le IIIe siècle en Corée. Il a ensuite connu un fort succès et s’est exporté vers d’autres pays d’Asie, comme la Chine, par exemple.

Le papier hanji est fabriqué à la main, selon un processus très long. Les fibres sont cuites à la vapeur et sont ensuite séchées, trempées, cuites à nouveau et pilées. Si cette technique est proche de celle d’autres papiers asiatiques, tels que le washi japonais ou le xuanzhi chinois, l’originalité du hanji réside dans l’étape du tamisage, qui permet aux fibres de circuler dans toutes les directions, et confère ainsi une certaine solidité à la feuille de papier.

Ce procédé de fabrication long et complexe contribue à la résistance et à la longévité du hanji, puisqu’il est supposé résister mille ans (alors que la durée maximale de conservation du papier classique ne serait que de deux cents ans). C’est la raison pour laquelle ce papier était utilisé pour de nombreux ouvrages traitant du bouddhisme coréen[1]. Il est également doux et lisse au toucher et, du fait de sa couleur blanche et de ses qualités absorbantes, il est aussi utilisé pour la calligraphie ou la peinture.

Par ailleurs, le hanji possède des propriétés isothermes et peut ainsi être utilisé pour tapisser les sols et les murs des maisons traditionnelles, mais aussi pour couvrir les fenêtres, afin de filtrer la lumière, tout en permettant de faire circuler l’air.

Malgré ses nombreuses propriétés, le papier hanji a pourtant connu une phase de déclin, du fait de l’émergence de nouveaux modes de production mécanisés. Afin de répandre cette technique traditionnelle à l’international, le gouvernement coréen a alors pris de nombreuses initiatives, notamment en organisant un colloque sur le hanji à Séoul, en 2014.

Finalement, le hanji est utilisé depuis quelques années dans le domaine de l’art contemporain, pour la peinture, la gravure, mais également pour la sculpture, à la fois par des artistes coréens, comme par des artistes internationaux, tels que Heryun Kim, Ran Hwang, ou encore l’artiste américaine Aimée Lee, qui transforme le papier en vases, en livres, en sculptures ou en robes.

Divers exemples de pliages, réalisés à partir de papier hanji sont accessibles en cliquant sur le lien suivant : Jeju_Guimé_visuels 

Sources

[1] Notamment pour le Jikji, un ouvrage contenant les éléments essentiels du bouddhisme zen, réunis par le prêtre Baegun à la fin de la période Goryeo, selon le site de l’UNESCO. Ce livre fait partie du patrimoine documentaire soumis par la République de Corée et recommandé à l’inscription au Registre Mémoire du monde en 2001.

La chanson bretonne et la Gwerz

Entre le XIXe et le XXe siècle, le chant était omniprésent et occupait une place importante dans tous les événements privés ou publics de la société bretonne. S’il est aujourd’hui lié à une forme de divertissement, il servait à cette époque à la fois à informer, à relater un événement, à raconter une aventure, ou à exprimer des croyances.

Malgré une baisse dans sa pratique au début du XXe siècle, la musique bretonne a connu un nouvel essor dans les années 1950-60, notamment grâce au développement des fêtes folkloriques et « fest-noz » dans la région.

Les chants et complaintes de Bretagne se caractérisent par :

  • Une diversité linguistique (entre langue bretonne, français et gallo)
  • Une constance de la monodie (chant à une seule voix) a capella
  • Un immense corpus de chants
  • Une transmission orale, adaptée et recréée selon les périodes ou les interprètes
  • Une pluralité de formes littéraires :
  1. La poésie lyrique en breton (chants de table, chants d’amour ou de noces, chants humoristiques ou satiriques, …) : les sonioù
  2. Le répertoire des chants religieux, nommés kantig
  3. La poésie épique qui regroupe en breton les gwerzioù et qui s’intitule la « gwerz »

Eva Guillorel (historienne ayant rassemblé plus de 2000 chants des XVIe et XVIIe siècles collectés en Bretagne) définit les gwerzioù comme des « […] pièces longues qui décrivent des faits divers tragiques à caractère local, qui montrent un important souci du détail dans les situations décrites et qui rapportent généralement avec une grande fiabilité le souvenir de noms précis de lieux et de personnes[1] […] ».

La gwerz est en effet la forme la plus ancienne de la poésie chantée en Bretagne et elle dépasse parfois la centaine de vers. Dans la société rurale bretonne, qui était marquée par la transmission orale, la gwerz servait autrefois à véhiculer des informations. Cette fonction a été réappropriée par les chanteurs contemporains, qui n’hésitent pas à ajouter des précisions relatives aux lieux, aux personnages et aux faits dans leurs chants.

Parmi les chanteurs de gwerz les plus connus, peuvent être cités Marc’harit Fulup ou François Vallée, qui produisirent un grand nombre de chants entre 1865 et 1900. Aujourd’hui, le répertoire de gwzerioù contemporains comprend des chants de Claudine Mazéas, qui réalisa des enregistrements en 1959 et des Sœurs Goadec qui étaient très présentes au début des années 1970. Les œuvres de ces chanteurs sont archivées et conservées par l’association Dastum, qui collecte et promeut le patrimoine oral et musical de Bretagne.

Finalement François-Marie Luzel, grand collecteur breton de la seconde moitié du XIXe siècle, parlait des gwerzioù comme de « chants sombres, fantastiques, tragiques, racontant des apparitions surnaturelles, des infanticides, des duels à mort, des trahisons, des enlèvements et des violences de toute sorte […][2] ». À mi-chemin entre récit véridique et épopée mystique, la gwerz conserve cette fonction populaire, et elle reste intrinsèquement liée à la société bretonne.

Sources

DE TROADEC, Ifig, « Les gwerzioù », publié en novembre 2016 sur le site Bécédia / Sevenadurioù. Lien URL : http://bcd.bzh/becedia/fr/les-gwerziou

DE TROADEC, Ifig, Fiche type d’inventaire du patrimoine culturel immatériel de la France « Chants et complaintes de Bretagne», portée par l’Association Dastum. Lien URL : Fiche inventaire « Chants et complaintes de Bretagne »

 

[1] Eva Guillorel, La complainte et la plainte: chansons, justice et culture dans la Bretagne (XVIe au XVIIIe siècles), Rennes, Presses universitaires de Rennes/Dastum/Centre de recherche bretonne et celtique, 2010.

[2] François-Marie Luzel, Chants populaires de la Basse-Bretagne – Gwerziou Breiz-Izel, Paris, Maisonneuve et Larose, 1971.

À pieds d’œuvres

Pour aller plus loin dans l’exploration de l’exposition LE PLUS TÔT C’EST DEUX JOURS MIEUX de Seulgi Lee, vous pouvez retrouver le dossier pédagogique À pieds d’œuvres, rédigé par Fabrice Anzemberg, professeur d’arts plastiques et conseiller relais de la DAAC (Délégation académique à l’éducation artistique et à l’action culturelle) pour le musée des beaux-arts et La Criée centre d’art contemporain. Le dossier pédagogique est accessible en cliquant sur le lien suivant : Doc_pédagogique_Criee_MBA

Photo : Rituel du Gut avec accessoires en papier découpé, pratiquée par les chamans en Corée du Sud

La poterie « féminine » du Rif marocain

Seulgi Lee décrit son œuvre MACHRUK (مشْروك), comme « une poterie vernaculaire de biberon ». Cette œuvre est issue d’un travail collaboratif avec Aïcha Lakhal, dans la région du Rif au Maroc.

Depuis le néolithique, l’ensemble du Maghreb, et cette région tout particulièrement, sont marqués par la pratique d’une forme de poterie traditionnelle. Cette technique rurale se transmet par les femmes de génération en génération, pour un usage réservé aux besoins de la famille, en privilégiant l’emploi de matériaux locaux. Son utilisation est liée aux besoins de la vie quotidienne (cuire, chauffer, préparer, conserver) et elle permet de produire différents contenants : khabia, la jarre ; guembour, la cruche ; barrada, le broc ; ghorraf, le gobelet ; hallab, le vase à lait ; jabbana, la soupière à couvercle et qallouch, le pot à beurre.

Ainsi, pour la maîtresse de maison, « [le] rythme du travail est marqué par son caractère domestique et la fabrication des poteries est une activité parmi celles qui jalonnent la vie quotidienne […][1] », puisqu’une « motte d’argile pétrie doit être mise en forme et une ébauche commencée doit être achevée avant que l’argile ne durcisse[2] ». Pour autant, certaines femmes s’organisent en douars-potiers, c’est-à-dire en corporations, afin de produire en grande quantité, comme c’est le cas à Aïn Bouchrik, où a été réalisée l’œuvre MACHRUK. La production de poterie dans ce village a acquis une certaine renommée, et on y comptait en 1930 entre 30 et 40 potières.

Enfin, cette forme de poterie est modelée (à la différence des poteries tournées, propres aux ateliers masculins) et elle se distingue des poteries citadines et richement décorées, sorties des grands ateliers comme Tétouan, Fès, ou Salé, où s’activent des potiers organisés en corporations depuis le Moyen Âge. Bien que fonctionnelle, la poterie féminine du Rif admet pourtant certaines ornementations ou l’application de motifs peints, issus de coutumes tribales, de la même façon que pour le tissage, notamment.

 

Les étapes de fabrication :

  • L’argile et le façonnage : l’argile calcaire qui est utilisée est recueillie à proximité de la maison ou du village. Les mottes sont réduites en poudre pour être mélangées à de l’eau afin d’obtenir une pâte. Par modelage traditionnel, le façonnage se fait sans tour avec un outillage rudimentaire ; après séchage, les pièces peuvent être recouvertes d’un engobe (enduit argileux) blanchâtre et d’un décor d’ocre rouge et brun dont les motifs sont rectilignes.
  • Le séchage : après fabrication, les poteries sèchent devant la maison ou près du point de cuisson.
  • La cuisson : elle ne nécessite pas systématiquement de four, elle peut se faire à même le sol, « à feu ouvert », alimentée par des branchages et des excréments d’ânes ou de vaches comme combustibles.

[1] H. Balfet, Poterie féminine et poterie masculine au Maghreb, thèse de doctorat d’État, sous la direction de A. Leroi-Gourhan, Paris, 1977, 2 vols., II, p. 155.

[2] Ibidem, p. 156.

Abécédaire

A

Artisanat : Une définition pourrait être celle de « tirer parti au mieux et avec le plus d’imagination possible, des produits naturels, animaux ou végétaux disponibles[1] ». L’UNESCO rappelle néanmoins que « la contribution manuelle directe de l’artisan demeure la composante la plus importante » des produits artisanaux[2].

[1] Etel Adnan, L’artisant créateur MAROC, éditions Dessain et Tolra, Paris, 1983.

[2] Définition de l’artisanat issue du Centre du commerce international, Guide méthodologique pour la collecte des données sur l’artisanat de 1997, publiée sur le site de l’UNESCO. Page consultée le 07 oct. 2019. Lien URL : http://uis.unesco.org/fr/glossary-term/artisanat-ou-produits-de-lartisanat

B

Ballade : Dans le sens commun de la fin du XXe siècle, le mot « ballade » s’est appliqué à un type assez large de chanson populaire, lente et mélodieuse.

C

Courte-pointe : Seulgi Lee utilise cette technique de couture pour la confection des couvertures Nubi. Il s’agit de coudre des morceaux de tissu les uns aux autres pour créer un dessus-de-lit orné d’un motif ou un autre objet domestique matelassé. On parle aussi de quilting.

D

DEPATTURE : C’est le nom donné à la masse de terre argileuse qui s’attache aux semelles des chaussures par temps de pluie. On raconte que deux collines se seraient formées : une à Taizé, une autre à Tourtenay, avec les dépattures des semelles de Gargantua alors qu’il secouait ses souliers.

E

Esprit étroit = Une grenouille au fonds d’un point puits, selon un proverbe coréen.

F

Folklore : Il s’agit de « l’ensemble des arts et traditions populaires d’un pays, d’une région, ou d’un groupe humain[3] ».

[3] Définition de « folklore » proposée par le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. Page consultée le 07 oct. 2019. Lien URL : https://cnrtl.fr/definition/folklore

G

Gut : Cérémonie rituelle dédiée aux défunts en Corée. Elle est pratiquée par des chamans et prend la forme d’un spectacle de danse et d’accessoires en papiers découpés qui fait appel aux esprits sur demande de la famille.

H

Hanji : Papier traditionnel coréen très résistant, fabriqué à la main à partir de fibres d’écorces de mûrier et selon un long processus de fabrication. Le hanji a la particularité d’être doux, lisse au toucher et il possède également des propriétés isothermes.

I

Ixcatèque : Langue orale préhispanique, aujourd’hui parlée par moins de dix personnes dans l’état d’Oaxaca, au Mexique.

J

Jeju (île) : L’île de Jeju se situe au sud de la Corée du Sud et a été classée au patrimoine mondial, en tant que bien naturel d’importance pour l’humanité en 2007, grâce à la présence de formations volcaniques et d’un réseau de tunnels de lave. Seulgi Lee a travaillé en collaboration avec un chaman de cette île pour réaliser l’œuvre CHUM.

K

KUNDARI : Mot inventé par Seulgi Lee. Il désigne une série de sculptures tubulaires en métal : KUNDARI araignée, KUNDARI taureau, KUNDARI abeille.

L

Langage : Point central du travail de Seulgi Lee, qui s’intéresse aux origines des langues parlées et écrites, et qui associe langage et image, notamment au travers de proverbes, comme dans le cas des couvertures Nubi.

M

MACHRUK (مشْروك) : En arabe, signifie « ensemble ». Œuvre réalisée par Seulgi Lee, selon le modèle de poterie domestique traditionnelle, pratiquée par les femmes dans la région du Rif au Maroc. La pièce est une forme agrandie de biberons, réalisée en collaboration avec Aïcha Lakhal.

N

Nubi : Couvertures traditionnelles coréennes réalisées selon la technique du matelassage « Tonyeong Nu » (équivalent du Sashiko japonais, Boutis provençal, Piqué marseillais) dans la ville de Tongyeong, située à l’extrême sud de la Corée du Sud.

O

Orphée : Héros de la mythologie grecque, poète et musicien, qui va jusqu’aux Enfers pour retrouver son amour Eurydice. Le mythe d’Orphée a fait l’objet de nombreuses œuvres artistiques (opéras et ballets, musique, théâtre, cinéma, poésie, peinture). Orphée est également parfois considéré dès l’Antiquité comme un mage ou un sorcier (à l’image des chamans en Corée).

P

Proverbe : C’est une formule langagière de portée générale contenant une morale, une expression de sagesse populaire ou une vérité d’expérience que l’on juge utile de rappeler. Il n’est pas attribué à un auteur : les proverbes sont souvent très anciens, d’origine populaire et par conséquent de transmission orale.

R

Rif : Région du nord du Maroc bordée par la mer Méditerranée et le Moyen Atlas, composée de montagnes et de plaines.

S

Seulgi : Prénom de l’artiste, qui signifie sagesse en coréen.

T

Trope : Figure de style, un trope résulte du fruit d’associations mentales qui conduisent au changement de sens des mots.

U

U : Signe désignant l’ensemble des couvertures Nubi. L’artiste établit un lien entre la forme en creux de la lettre « U », et l’image de la couverture de lit. La forme du « U » renverrait alors à un récipient qui pourrait tout contenir.

V

Vernaculaire (du latin vernaculus, « du pays, indigène, national ») : Adjectif utilisé pour qualifier ce qui provient d’un pays ou d’une région donnés, avec des caractéristiques propres et localisées (langue, architecture, savoir-faire, traditions, etc.).

W

W : Signe désignant l’ensemble de paniers et vanneries réalisés en collaboration avec la coopérative des vannières à Santa Maria Ixcatlàn au Mexique.

Ile aux femmes

Paroles du film ÎLE AUX FEMMES

film, 16 min, 2019
collaboration avec Anne-Laure Vincent et Clémence Mimault
image et montage Pierre-Philippe Toufektchan
production La Criée centre d’art contemporain, Rennes

 

  1. Le Panier

Je connaissais une femme qui tissait toute la journée
d’algue elle faisait son panier elle n’était pas grande

Puis arrivé le soir elle allait enfin promener
sautillait sur le plancher qu’un bon diable rythmait

quand le bal commença quand la marée remonta
deux hommelettes s’approcha comme des harengs sort

Il l’a prise bras dessus bras dessous jamais pays n’avait vu
des visages mal foutus tels des goémons

Ma jolie fille ma jeune femme ne reste pas seule la nuit
comme on vient de le dire ici bien des malheurs arrivent

 

  1. Devinez où

Devinez où devinez où
(on) allait chercher des chansons légères chantées par des femmes

 

  1. Un soir d’été

Sur l’île aux Femmes un soir d’été tu ne manieras pas mon panier
de la pêche je m’en retournais tu ne mi tu ne ma tu ne manieras
tu ne manieras pas mon derrière tu ne manieras pas ton tube bas

de la pêche je m’en retournais tu ne manieras pas mon panier
il est rempli de crustacés tu ne mi tu ne ma tu ne manieras
(tu ne manieras pas mon derrière tu ne manieras pas ton tube bas)

 

  1. Les vacances

On va passer nos vacances en Île-et-Vilaine
on a les clés d’une baraque pour toute la semaine

Une maison de famille celle de tati Germaine
elle qu’on n’a jamais connue on le lui dit amen

On prend la voiture et fait le plein de kérosène
fait le plein de petit lu et de galettes à l’ancienne

Il y avaient des bouchons d’enfer traversant la Mayenne
et sur notre itinéraire on était à la traîne

On s’est raconté l’histoire celle de Madeleine
qui avait été prise en stop à la sortie de Rennes

Elle ne connaissait vraiment personne dans la Volkswagen
en s’asseyant elle effleura la jambe du capitaine

Bronzé doré mais pas grillé il revenait de Cayenne
un doigt sur la carte IGN, un doigt sur sa châtaigne

Personne d’autre que dans la bagnole n’habitait la scène
tous deux avaient les doigts qui puaient et qui sentaient la murène

Quand leurs regards se sont croisés ça voulait dire je t’aime
et (mais) cette histoire est terminée date Mathusalem

Nous voilà enfin arrivés en zone péri-urbaine
brico-dépôt intermarché un vrai jardin d’Eden

On a rencontré une vieille c’était une teigne
on aurait dû se méfier rien qu’à son haleine

Elle se brosse pas les dents jamais elle ne se peigne
mais vue qu’on est un peu hippie c’est pas ça qui nous gêne

 

  1. Cui cuisse

Une fois par mois deux fois par an
réussissent non sans malice
à nous faire écarter les cuisses
oh mon dieu quelle délice
c’est pas vraiment un sacrifice
car on nous entend jusqu’en Suisse

 

  1. Troué troué

Par une dame âgée troué troué … mon panier emporté
mon panier tissé par une dame âgée troué troué …
mon panier emporté par la marée reviendra dans un siècle après
tout juste bon pour les navets du village vieux et mous comme eux
ceux qui n’ont pas d’âge

 

7.8. Quand j’ai  marché sur l’Île aux Femmes (Le fantôme)

Quand j’ai marché sur l’Île aux Femmes en revenant de Penvénan
je n’ai croisé qu’une triste dame agenouillée comme une enfant
est-ce un fantôme ? est-ce une femme ?
est-ce un fantôme ? a-t-elle une âme ?

si dame est-elle dépourvue je ne sais pas comment je l’aurais su
j’aurais quand même été courtois on ne sait jamais avec ces gens-là
est-ce un fantôme ? est-ce une dame ?
a-t-elle un foie ?  a-t-elle une âme ?

 

  1. Larit c’hwi din ma

mamm (bal plin)

Larit c’hwi din ma mamm, larit din frañchamant
Pesort si a gavit c’hwi, gavit c’hwi d’am galant

Ho kalant c’hwi, ma merc’h, na gavan si ebet
Mez n’eus u visaj treitour, o n’hag ur fri trousset

Hag ouzhpenn-se ma merc’h e n’eus re a arc’han
Laket e n’eus pevar skoued, da brenañ ur porpant

Na benn nefe laket na toud e holl ar’hant
Na hennezh e’eo ma mamm, an hini a garan

Dite-moi ma mère dites-moi franchement
quel défaut trouvez-vous à mon galant

Ton galant ma fille je ne trouve aucun défaut
sauf qu’il a le visage traître et puis il a le nez retroussé

En plus de ça ma fille il a trop d’argent
il a mis quatre sous (écus) pour acheter un pourpoint
tu mangeras du pain mais il sera mouillé de tes larmes

Avec Anne Auffret à Bourbriac le 10 août 2019
Kanet gant Catherine Duro
Kanet gant Marsel Gwilhou hag Annie Ebrel war ar c’hasetenn « Fañch ha fisel »

 

  1. Kouign amann

Koui koui kouigna mann miam miam …
plein de beurre plein de sucre
c’est comme du pain en meilleur
on te tourne on te mange
tête de tête de Kouign amann
je te croque je te roule,

 

  1. Pa vez deuet miz

abril ha miz mae
Pa vez deuet miz abril ha miz mae
Quand arrivent le mois d’avril et le mois de mai
Koumañs an delioù dond er gwez
Les feuilles commencent à arriver sur les arbres

Ritournelle :

Joli beau, joli petit beau – ma merc’h/ma mère m’attend war bank

– ma fille  sur le banc

War benn ar bank, ma dousig koant

Sur le bout du banc

Ar paner du, ar paner gwenn
Le panier noir, le panier blanc
Ya gant ar merc’hed da bourmen
Vont avec les filles se promener

  1. Pa vez deuet miz

abril ha miz mae

Pa vez deuet miz abril ha miz mae
Koumañs an delioù dond er gwez

ma merc’h/ma mère m’attend war bank
War benn ar bank, ma dousig koant

Ar paner du, ar paner gwenn
Ya gant ar merc’hed da bourmen

Ar busku dous hag an hini dous
A teu gante a zousennoù

Pa vez laret dezho dond en ti
Ar merc’hed a respont mersi

Pa neufent bet daou pe dri banne
Ar merc’hed sko war an hini kreñv

Neuze vezont konduet d’ar gêr
Koulz a-dreist kleuz ha dreist voger

Div deus outo zo bet klañvet
Da gaout ’n apotiker int zo aet

« Bonjour Monsieur le Potiker (le pot’ig kaer) (le joli garçon en breton – jeu de mot)
Voulez-vous soulager nos misères ? »

Eben e ya e brezhoneg
« Me zo ive’ gant memes kleñved. »

Quand arrivent le mois d’avril et le mois de mai
Les feuilles commencent à arriver sur les arbres

Ritournelle :

Joli beau, joli petit beau – ma fille sur le banc

Sur le bout du banc

Le panier noir, le panier blanc
Vont avec les filles se promener

Le biscuit sucré et la boisson ? sucrée
Viennent à elle par douzaines

Quand on leur dit d’entrer dans la maison
Les filles disent merci

Quand elles auraient eu deux ou trois coups
Les filles s’attaquent à celui qui est plus fort/plus dur

Ensuite, on les ramène à la maison
Par dessus talus aussi bien que mur

Deux d’entre elles sont tombées malades
Et sont allées chercher l’apothicaire

« Bonjour Monsieur le Potiker (le pot’ig kaer) (le joli garçon en breton – jeu de mot)
Voulez-vous soulager nos misères ? »

L’autre dit en breton
« Moi aussi, j’ai la même maladie. »

Collecté par Daniel Jéquel auprès de Tintin Mari en pays bigouden, appris auprès d’Ifig Flatrès
Envoyé amicalement par Brigitte Kloareg. Autorisation en cours auprès de Daniel Jéquel.

Jipsin, paire de sandales tressées

Il est question de sandales en paille dans la couverture U: Même la sandale de paille trouve sa paire = Une âme soeur existe pour chacun et chacun.e, peut-être s’agit-il de « Jipsin », sandales de paille coréenne tressées à la main ?

Jipsin

Cette paire de sandales populaires portée au quotidien en Corée a pu être fabriquée par la personne qui les a portées (on imagine un paysan), en utilisant des matériaux (paille de riz) peu onéreux trouvés dans son environnement proche.

Ce type de sandale nommée jipsin du nom de la paille servant de matière première, est fabriqué dès la période Joseon (1392–1897). Le nom de la sandale fait référence à la plante employée pour le tressage et au statut de la personne à qui elles sont destinées. Ainsi les jipsin sont tressées moins finement que les mituri, du nom du type de chanvre employé, qui sont portées spécifiquement par les jeunes confucéens et la noblesse.

Les jipsin, sandales coréennes portées par les gens du peuple à la période Joseon (1392-1897) sont tressées à partir de fibres végétales comme la paille de riz ou de carex en Corée.

Sources : Photographie, vue d’inventaire de la paire de jipsin, Musée des Confluences (Lyon, France). Description, Musée des Confluences (Lyon, France)

Film sur la fabrication des jipsin – You-Tube

*H. H. Arnason, History of Modern Art : Painting, Sculpture, Architecture, New York, Harry Abrams Inc., 1968.

Film sur la fabrication des jipsin – You-Tube

Film sur la fabrication des jipsin – You-Tube

Les coulisses en images

Seulgi Lee a réalisé plusieurs montages photographiques de ses résidences (en Corée, au Mexique et au Maroc) qui présentent l’environnement et les étapes de fabrication de différentes pièces de son exposition à La Criée (un grand merci à elle) :

Ci-dessus, les étapes de fabrication des couvertures U (sources d’inspiration et collaboration avec Sukhee Chung et Seungyong Cho (Tongyeong, Corée du Sud).

Ci-dessous, les étapes de fabrication de W et des vanneries en feuilles de palmier avec la coopérative des vannières Xula (Santa Maria Ixcatlan, Mexique) :

KUNDARI, Gargantua et la Bretagne

Les oeuvres de Seulgi Lee tendent de rendre visibles le liens entre artisanat et culture orale. Ses objets sont inspirés ou traduisent certains mythes, récits, contes ou chansons.

L’ensemble KUNDARI, un mot inventé par l’artiste, lui a été inspiré par le conte populaire Gargantua. Ce géant régnant en Utopie se serait déplacé d’est en ouest suivant la course du soleil. Natif de Plévenon, le célèbre personnage de Rabelais aurait laissé sa trace dans de multiples lieux de Bretagne: quand lui a pris l’envie de visiter Rennes, il passa par Matignon et Plancoët pour faire halte à Dinan. Et si Gargantua avait été une femme ? En contre-point de cette démesure masculine, Seulgi Lee pose à même le sol les KUNDARI, de grands stabiles en métal peint, des formes abstraites et géométriques représentant des sexes féminins géants.

Gargantua fut écrit par François Rabelais en 1534. Le nom de ce géant est aujourd’hui passé dans le langage courant pour désigner un appétit énorme et insatiable, dit « gargantuesque ». A sa naissance, Gargantua ne pleura pas comme n’importe quel nouveau-né, mais réclama « à boire, à boire ! », si bien que Grandgousier, son père, l’entendant s’époumoner ainsi s’écria « quel grand tu as », sous-entendu « gosier », et qu’il devint donc Gargantua (quel grand tu as). Il fallut plusieurs vaches pour rassasier sa soif.

Sous forme de chroniques en prose et en vieux français Rabelais explore le registre du conte autant que celui du portrait satirique. Une verve populaire s’y exprime joyeusement et Rabelais ne manque pas d’user de jurons ou obscénités. Ce ton lui permet d’exprimer sa philosophie en toute liberté malgré la censure et les guerres de religion propres à l’époque de François Ier. On peut ainsi lire à travers le roman, l’idéal d’une éducation où se mêlent hygiène, sport et savoir, au fil d’aventures comiques et magnifiques, de guerres en ripailles sans oublier le plaisir puisque le géant a grand besoin d’assouvir ses besoins sexuels et alimentaires.

Le trajet de Gargantua en Bretagne:

En passant à Languédias, Gargantua avale des pierres sonnantes qu’il vomira plus loin, incommodé par l’odeur du poisson au Guildo. Il crée ainsi le rocher de la Héronnière à l’embouchure de l’Arguenon et les pierres sonnantes de la Goule d’enfer. Ainsi une multitude de rochers seraient là de son fait, tantôt jetés, tantôt vomis, tels les pointes de la Garde et du Bé, le rocher du Bécrond et celui du Canevet, ainsi que les deux feuillatres. Toujours sur la côte de Saint-Malo à Erquy, il lance la Basse à Chiambrée et le Petit et le Grand Bourdineau. L’Amas du Cap au large du Cap Fréhel provient d’un caillou qui le gênait dans sa chaussure. Il crée aussi le rocher de la Latte d’un coup de pied et plante son bâton près du fort, un menhir de près de 3 mètres. Sur la route de Saint-Malo, en repensant à l’odeur du poisson qui séchait à Saint-Jacut-de-la-mer, il vomit l’île d’Agot, Neput et la pointe du Décollé. C’est après avoir mangé et bien bu, qu’il rejette le Grand-Bé et le Petit-Bé dans la rade de Saint-Malo. Un autre gravier dans sa chaussure devint le rocher de Cancale. D’un coup de pied, il fait naitre l’Anse de Mordreuc et on trouve une de ses dents à la pointe de Garot, et une autre à Saint-Suliac. Il plante sa canne dans la baie de la Fresnaye créant le rocher Calenfri, le menhir de Saint-Samson lui servait de pierre à aiguiser. Il est aussi à l’origine de l’étang de Jugon, et donc de l’Arguenon, mais aussi du Frémur. C’est à Plévenon qu’on trouve l’empreinte de ses pieds près de Fort la Latte, ainsi qu’au bois de Meurtel. On raconte qu’il arracha une forêt créant ainsi la baie de la Fresnaye afin de se faire construire un gigantesque navire. Il aurait même trouvé l’amour sous les traits d’une fée des eaux de la Rance.

sources : François Genevrier, Territoires des légendes de Gargantua, bio-scene.org  

Bibliographie Seulgi Lee

Publications Seulgi Lee :
DAMASESE, Gallery Hyundai, 2018
Seulgi Lee, livre d’artiste fait à la main
Intense proximité : Une anthologie du proche et du lointain, La Triennale 2012, CNAP-Palais de Tokyo
Idem, Seulgi Lee, Centre d’art contemporain de la ferme du Buisson, 2009

Magazines
Wallpaper, avril 2019
Korea now ! Musée des arts décoratifs, Paris, 2016
Parisprojectroom, 2002

Autour de la chanson
Anciennes complaintes de Bretagne, Françoise Morvan, Editions Ouest-France 2010
Histoire de la chanson populaire bretonne, Patrick Malrieu
Chansons malicieuses chansons licencieuses, Pierre Chevrier, Dastum
Mythologie des Deux-Sèvre, Guy Pillard
Chansons populaires du Poitou-Charentes Vendée, Claude Ribouillault
Bestiaire poitevin, Foyer rural de Saint-Loup Lamairé

Anthropologie, art, artisanat
Marcher avec les dragons, Tim Ingold, Zones sensibles, 2013
Lettres mortes : Essai d’anthropologie inversée, Pierre Déléage, Fayard, 2017
Le chant de l’Anaconda, Pierre Déléage, 2012
Le langage de la déesse, Marija Gimbutas, Editions des Femmes (11 mai 2006)
Anthologie des mythes, légendes et contes populaires d’Amérique, Benjamin Péret, bibliothèque Albin Michel
Éloge du carburateur, Matthew Crawford, Editions La Découverte
La mémoire du geste : La poterie domestique et féminine du Rif marocain, André Bazzana
L’artisanat créateur : Maroc, Etel Adnan
La poterie féminine au Maroc, Berrada Hammad
Artes de Mexico No38/1997, Cesteria

To weave and sing : Art, symbol, and narrative in the South American Rain Forest, David M.Guss
Guimé, cérémonie de l’île de Jéju
Korean Shamanistic Rituals, Jung-Young Lee
Cahiers d’Extrême-Asie : Chamanisme coréen

Bibliographie jeunesse
Au lit! Louise-marie Cumont, éditions Mémo, 2009
Orphée, Yvan Pommaux, l’Ecole des loisirs, 2004

U : Mon nez est long de trois pieds

Mon nez est long de trois pied
= J’ai tellement de problèmes que je ne peux pas prendre soin des autres.

Dans l’exposition Le plus tôt c’est deux jours mieux, Seulgi Lee expose six couvertures de l’ensemble U, dont les compositions géométriques et colorées interprètent des proverbes coréens.

Un proverbe est une formule langagière de portée générale contenant une morale, une expression de sagesse populaire ou une vérité tirée d’une expérience que l’on juge utile de rappeler. Un proverbe n’est pas attribué à un auteur, il est souvent très ancien, d’origine populaire et par conséquent de transmission orale.

Les images ou métaphores employées en coréen possèdent le plus souvent un équivalent français :

  • U : Mon nez est long de trois pieds = J’ai tellement de problèmes que je ne peux pas prendre soin des autres

« Ne pas voir plus loin que le bout de son nez »

  • U : Lécher l’extérieur de la pastèque = Bâcler, vouloir aller trop vite

« Mettre la charrue avant les bœufs »

  • U : Même la sandale en paille trouve sa paire = Une âme sœur existe pour chacun.e

« Chaque pot a son couvercle » ou « Trouver chaussure à son pied »

  • U : Une grenouille au fond d’un puits = Un esprit étroit

« Avoir la tête près du bonnet » ou « Lorsque le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt  »

  • U : Réparer l’étable après avoir perdu la vache = Trop tard

 » Mieux vaut prévenir que guérir »

  • U : Mots coulent comme de l’eau, rampent comme un insecte = Rumeur

« Un bruit qui court »

  • U : La parole aux lèvres salivées = Mensonge

« Dire la vérité du bout des lèvres »

 

Les couvertures Nubi

Les couvertures Nubi étaient très répandues dans les foyers coréens jusque dans les années 1980. Dans un souci pratique, la partie centrale, autrefois cousue de figures symboliques d’animaux en fil de soie, se détachait afin de pouvoir laver la couverture. Dans les années 1980 de simples bandes de couleur ornaient cette partie centrale. La couverture Nubi est fabriquée à la main, selon la technique de matelassage « Tonyeong Nu » équivalent du Sashiko japonais, du Boutis provençal ou encore du Piqué marseillais. Celle-ci permet de garder la chaleur tout en s’aérant grâce au relief créé par le rembourrage de coton surpiqué, la structure du tissu étant ainsi renforcée.

Depuis 2014, Seulgi Lee travaille à la création de l’ensemble « U »en collaboration avec des artisans de Tongyeong – ville portuaire située à l’extrême sud de la Corée qui a donné son nom aux couvertures- . La particularité de la technique Tongyeong Nubi réside dans le fait que le tissu est cousu à la machine ligne par ligne. Les soies colorées de l’ensemble « U » prennent ainsi un léger relief qui réfléchit la lumière. Chaque couverture raconte un proverbe. Seulgi Lee les a choisis pour leur puissance d’évocation et leur humour. Elles les a traduits en différentes compositions colorées abstraites, dont les symétries sont liées à la particularité du format de la couverture. Cependant, son dessin influe aussi parfois sur la forme, pour exemple, le tracé d’un arc-de-cercle a récemment donné lieu à l’invention d’un nouveau type de couture en lignes courbes transformant ainsi la technique de confection traditionnelle.

Les couvertures de l’ensemble U sont considérées par Seulgi lee comme des « sculptures votives » qui mêlent le tangible et l’invisible. Dans un usage quotidien, elles imprègnent les rêves du dormeur d’un imaginaire collectif. « Celui qui dort sous cette couverture peut rêver au proverbe et tourner comme une boussole ».

Les oeuvres qui font écho aux couvertures Nubi dans l'exposition

U : 유언비어 (流言蜚語). Yu-eon-bi-eo.
U : Mots coulent comme de l’eau, rampent comme un insecte. = Rumeur.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2019
collaboration avec Seungyeon Cho de Tongyeong, Corée
production : La Criée centre d’art contemporain, Rennes
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : 짚신도 짝이 있다. Jip-sin-do Jjag-i It-da.
U : Même la sandale en paille trouve sa paire. = Une âme soeur existe pour chacun·e.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2017
collaboration avec Sukhee Chung et Seungyeon
Cho de Tongyeong, Corée
courtesy galerie Jousse Entreprise, Paris

U : 우물 안 개구리 (井中之蛙). Ou-moul An Gyeguri.
U : Une grenouille au fond d’un puits. = Esprit étroit.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2018
collaboration avec Sukhee Chung et Seungyeon
Cho de Tongyeong, Corée
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : 소 잃고 외양간 고친다 (亡牛補牢). So Il-ko Wae-yang-kan Go-tchin-da.
U : Réparer l’étable après avoir perdu la vache. = Trop tard.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2018
collaboration avec Sukhee Chung et Seungyeon Cho de Tongyeong, Corée
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : 내 코가 석자 (吾鼻三尺). Ne Ko-ga Seok-ja.
U : Mon nez est long de trois pieds. = J’ai tellement de problèmes que je ne peux pas prendre soin des autres.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2018
collaboration avec Sukhee Chung et Seungyeon Cho de Tongyeong, Corée
courtesy Gallery Hyundai, Séoul

U : 수박겉핥기. Su-bak-keul-hal-ki.
U : Lécher l’extérieur de la pastèque. = Bâcler.
soie de Jinju, coton, 155 x 195 x 1 cm, 2014
Sukhee Chung et Seungyeon Cho de Tongyeong, Corée
courtesy The National Gallery of Victoria, Melbourne

L'exposition