Judith Kakon, « Grand Air » - Ressources pédagogiques

Biographie

Judith Kakon
Née en 1988 à Bâle, Suisse
Vit et travaille à Bâle, Suisse
site de l’artiste

 

Judith Kakon est une artiste suisse qui est diplômée de l’Académie d’Art et de Design Bezalel à Jérusalem (2013) et de l’école d’arts Bard MFA à New-York (2016). Elle a exposé à l’international, notamment en Suisse (Kunsthalle, Bâle, 2020), en Israël (Ventilator, Tel Aviv, 2019), en Allemagne (Kunsthaus L6, Freiburg, 2017) et en Italie (Studioli, Rome, 2016). Elle a obtenu plusieurs prix artistiques, dont le prix de Bâle (2016), le prix Kiefer Hablitzel (2017) et le prix d’art du Manoir de Schaffhausen (2021).

Son exposition Grand Air à La Criée est sa première exposition personnelle en France.

Judith Kakon travaille la sculpture, l’installation, la vidéo, le texte, l’affiche, le design et la photographie.

Judith Kakon s’inspire des objets du quotidien, de la société de consommation, du commerce et de la mondialisation. Elle s’intéresse de près à la circulation, au devenir et au réemploi des objets manufacturés et des images afin de développer des œuvres d’art uniques à partir d’objets produits en série. Dans ses œuvres, elle questionne les déplacements entre l’espace public et l’espace d’exposition. Dans l’installation présentée à La Criée, elle réemploie les lumières de noël de la ville de Rennes initialement visibles dans l’espace urbain pendant la période des fêtes. Ces objets se retrouvent décontextualisés en étant présentés dans un espace d’exposition. Leur mise en espace propose un renouvellement du regard sur les formes et les usages de ces illuminations, qui adoptent ici de nouvelles significations.

Judith Kakon s’intéresse aussi au langage, à sa circulation et à sa traduction. En avril 2021, Stolen Language, son catalogue, est publié. Il réunit un ensemble d’images de toutes ses œuvres ainsi que quelques textes présentant certains de ses travaux et sa démarche artistique.

Abécédaire

Alibaba : nom d’une plateforme de e-commerce chinoise vendant divers objets comme des vêtements, du maquillage, des meubles etc. Judith Kakon a conservé et documenté sa correspondance avec les vendeuses et vendeurs du site et expose à La Criée des impressions numériques des mails reçus pendant la crise du Covid-19. Affiche : feuille imprimée qui contient des informations et--ou des images pour les publics et qui peut être visible dans des espaces dédiés et dans la rue (ex. : affiche publicitaire). Elle est aussi beaucoup utilisée par les artistes aujourd’hui pour créer des œuvres. Judith Kakon travaille par exemple à partir d’une affiche publicitaire dans son œuvre Swiss-Li.

Bâle : ville qui se trouve au nord-ouest de la Suisse, près des frontières allemandes et françaises. Judith Kakon y est née en 1988, puis elle y a travaillé et vécu.

Capitalisme : régime économique reposant sur l’échange de biens et de services et notamment sur la vente et l’achat. À travers ses œuvres, l’artiste interroge le capitalisme qui encourage la surconsommation. Consommation : achat en masse de biens matériels comme de la nourriture, des vêtements ou des appareils électroniques. L’épidémie de la Covid-19 a bouleversé les habitudes de consommation des individus et la facilité de circulation des biens dans le monde, notamment des objets provenant de Chine. Judith Kakon s’intéresse à cette interruption du transport des marchandises pendant la crise de la Covid-19 dans sa série Untilted (Alibaba, Corona).

Détournement : utiliser un objet d’une autre manière que ce pourquoi il a été inventé. Judith Kakon expose des objets qui n’étaient pas destinés à devenir des œuvres d’art au moment de leur fabrication.

Echanges : circulation des biens, des marchandises dans le monde. Judith Kakon s’intéresse à ces échanges dans certaines de ses œuvres, comme dans la série Untilted (Alibaba) (2015-2020), dans laquelle elle présente sa correspondance par e-mail avec des vendeuses et vendeurs de la plateforme commerciale chinoise Alibaba.

Forme : ensemble des traits caractéristiques permettant de reconnaître un objet. Judith Kakon s’intéresse tout particulièrement aux formes des lumières de noël et aux significations liées à ces formes.

Héliogravure : technique d’impression dans laquelle les éléments qui impriment (cylindres) sont en creux plus ou moins profonds pour appliquer l’encre. Judith Kakon utilise cette technique dans sa série d’œuvres Parcel scans (PostPac).

Image : illustration visuelle comme un dessin, une photographie ou une illustration mentale. Cela peut-être une image réelle comme une photographie d’un arbre, ou imaginaire, comme le dessin d’une fée. Dans l’exposition, Judith Kakon modifie des images déjà existantes pour leur donner un sens nouveau. Elle s’intéresse à la manière dont circulent les images dans nos sociétés et aux différentes significations qu’elles peuvent avoir selon le contexte dans lequel elles sont présentées. Installation : œuvre d’art en trois dimensions qui peut mélanger différentes pratiques artistiques et matériaux, comme la vidéo, le son et la sculpture par exemple. Ce type d’œuvre est souvent créé pour s’intégrer dans un lieu ou un espace précis à la manière d’un environnement. Judith Kakon construit une installation en réutilisant les lumières de noël de la ville de Rennes associées à des racks en métal dans l’espace d’exposition de La Criée.

Lumière : ce qui nous permet de voir et de nous éclairer. Elle est aussi utilisée de manière décorative comme à Noël où les rues sont illuminées. Judith Kakon travaille la lumière et surtout, dans son exposition, l’absence de lumière et ses effets.

Madonna del Bel Ramo : nom italien de la Vierge de Bétharram, utilisé comme titre pour une des œuvres de Judith Kakon. La Vierge de Bétharram est une statue créée par le sculpteur Alexandre Renoir pour le sanctuaire de Notre-Dame de Bétharram, situé dans les Pyrénées-Atlantiques en France. Plusieurs copies de cette statue ont circulé, dont une en bois qui a été vendue par un internaute français sur eBay et qui s’est retrouvée au Sanctuaire des Miracles à Rome. Judith Kakon a vu cette reproduction à Rome et en a conservé la photographie qu’elle réemploie aujourd’hui dans une de ses œuvres qui questionne la circulation des images et des œuvres d’art dans le monde. Mondialisation : c’est l’ensemble des échanges entre les différents continents de la planète : commerce, voyage, économie. Dans ses œuvres, Judith Kakon fait référence à la mondialisation et a ses conséquences comme la surconsommation.

Noël : les décorations utilisées par l’artiste à La Criée sont à l’origine les lumières de noël de la ville de Rennes.

Objet : chose fabriquée à partir de différents matériaux, que l’on peut voir dans notre vie de tous les jours (comme des chaussures, une chaise…). Ces objets du quotidien sont réutilisés par beaucoup d’artistes, notamment depuis Marcel Duchamp, pour être présentés dans les espaces d’exposition comme des œuvres à part entière. Judith Kakon réemploie ces objets dans ses œuvres.

Parapluie : objet en tissu très tendu qui permet de se protéger de la pluie. L’artiste transforme cet objet du quotidien en œuvre d’art en proposant une série de photographies montrant des parapluies abîmés et cassés au détour des rues. Cet objet de grande consommation, produit en série, devient alors unique lorsqu’il est photographié par Judith Kakon. Publicité : l’ensemble des moyens utilisés pour faire connaître une personne, un évènement, un magasin etc. Judith Kakon réutilise plusieurs supports de publicité dans son exposition comme un dépliant présentant les services spirituels proposés par le guérisseur Mr Bamba à Londres ou encore un sac de courses à l’effigie du magasin de luxe La Samaritaine situé à Paris. Point de vue : manière de traiter un sujet, de se positionner selon une réflexion personnelle et/ou collective. Il y a une multiplicité de points de vue possibles qui varient en fonction de notre manière de voir et de percevoir le monde. Judith Kakon travaille sur cette notion de point de vue en détournant l’usage habituel des lumières de noël de la ville qui deviennent à La Criée de nouveaux objets artistiques exposés. L’artiste offre ainsi un nouveau point de vue décalé qui nous pousse à adopter un regard inédit sur ces objets.

Quotidien : ce qu’on a l’habitude de faire et de voir tous les jours. Judith Kakon réemploie des objets du quotidien dans ses œuvres et en fait des sujets à part entière, comme dans sa série Disparate Images par exemple dans laquelle elle photographie des parapluies brisés dans les rues.

Rack : étagère, portant qui sert à ranger de gros objets. Les racks sont souvent très imposants et en métal. Ils servent de rangements dans les entrepôts et les réserves. Pour l’exposition, Judith Kakon a fabriqué des racks afin d’entreposer mais aussi de montrer les formes de stockage des illuminations de Noël à l’image de celui des entrepôts de la ville de Rennes (qui ne sont normalement pas visibles pour les publics). Reproduction : imiter ou créer à nouveau un objet. Judith Kakon s’intéresse à la question de la reproduction et de la série au sein de la société de consommation et de l’art.

Scan : copie numérique d’un papier. L’artiste expose des impressions en héliogravure faites à partir de scans d’étiquettes des colis qu’elle a reçus dans sa série Parcel scans (PostPac). Stockage : rangement d’objets pendant une longue période jusqu’à leur prochaine utilisation ou réutilisation. Judith Kakon se questionne sur le stockage des illuminations de Noël de la ville de Rennes, sur ce qu’elles deviennent hors des périodes de Noël lorsqu’elles dorment dans les entrepôts de rangement. Samaritaine : grand magasin de luxe situé à Paris qui a ouvert en 1870. Judith Kakon utilise un sac de shopping avec son logo (paon) dans une de ses œuvres nommée Samaritaine. Le nom de La Samaritaine provient de la première pompe hydraulique de Paris, destinée à alimenter en eau le Louvre et le Jardin des Tuileries sur le Pont Neuf. Cette pompe tire elle-même son nom d’une femme présente dans un des épisodes de la Bible (Évangile de Jean) qui donna de l’eau à Jésus devant le puits de Jacob en Samarie. Swiss-Li : barre de chocolat suisse créée par le chocolatier Camille Bloch, qui n’existe plus aujourd’hui. Judith Kakon reprend dans sa série Swiss-Li l’affiche de publicité qui a été faite pour ce produit dans les années 1980 et intervient dessus, notamment en la recadrant.

Transposition : faire passer quelque chose d’un domaine à un autre, d’un usage à un autre. Par exemple, Judith Kakon le fait en amenant des objets comme les lumières de noël de la ville dans l’espace d’exposition, ce qui les déplace dans le domaine artistique.

Urbain : tout ce qui appartient à la ville, par exemple les illuminations de noël.

Vente : échanger un bien (un objet par exemple) contre de l’argent. Judith Kakon s’intéresse à la circulation et au devenir de ces biens dans plusieurs de ses œuvres, comme dans sa série Disparate Images par exemple, où elle photographie le destin funeste des parapluies aux abords des rues de la ville.

Les inspirations de Judith Kakon (photographie)

Judith Kakon a commencé ses premières séries photographiques pendant ses études d’art à Tel Aviv, en Israël. Elle s’attarde sur les objets « ordinaires » du quotidien et en fait les sujets principaux de ses photographies. Au fil de ses promenades urbaines, elle capture des objets et des lieux liés à la société de consommation (objets manufacturés, flyers de publicité et boutiques de vêtements par exemple). Elle travaille sur des cadrages qui amènent les spectatrices et spectateurs à adopter différents points de vue sur les éléments photographiés. Elle utilise tant le noir et blanc que la couleur dans son travail. Elle peut se rapprocher de plusieurs photographes dans son approche artistique.

Ugo Mulas (1928-1973) :

Ugo Mulas est un photographe italien, proche des artistes de l’arte povera dans les années 1950. Il commence la photographie en étant autodidacte.

Il est le photographe officiel de la Biennale de Venise de 1954 à 1972. En 1964, il y rencontre plusieurs artistes américains issus du Pop Art et part pour les États-Unis dans le but de photographier ces artistes et les rues de New-York.

En 1970, il entame une série de quatorze photographies accompagnées de textes, Le Verifiche (Les Vérifications), qu’il continuera jusqu’à sa mort en 1973. Ces œuvres conceptuelles ont pour thème le médium photographique en lui-même, ses aspects techniques et symboliques pour le photographe. Elles mettent an avant la dimension construite et artificielle de l’image ainsi que son rapport au temps et à l’espace. Ugo Mulas va ainsi interroger dans cette série des aspects tels que l’exposition du film, le réglage du diaphragme et de la vitesse, le temps de pose, l’agrandissement, etc.

Par exemple dans l’agrandissement (De ma fenêtre, en mémoire de la fenêtre Gras. Verifiche n°6), il photographie une boutique vendant du matériel photo depuis sa fenêtre. La photographie a été recadrée et agrandie jusqu’à saturation pour ne laisser apparaître que l’enseigne du commerçant.

Luigi Ghirri (1943-1992) :

Luigi Ghirri est un photographe italien. Géomètre de profession, il commence la photographie dans les années 1970 en capturant des images des villes et des campagnes de Reggio d’Émilie, sa province natale en Italie. Il décide de travailler ses photographies exclusivement en couleurs. Il interroge l’omniprésence des images et leur circulation au sein de la ville. Il s’intéresse notamment aux images de publicité kitsch et aux reproductions, affiches, maquettes et cartes dans ses déambulations urbaines. À l’image de la réflexion d’Ugo Mulas, Luigi Ghirri développe une démarche conceptuelle et questionne le médium photographique en lui-même en souhaitant que son travail soit une invitation à « penser par images ».

Par exemple, sa série Kodachrome rassemble des photographies d’affiches, de panneaux publicitaires, de cartes postales et d’autres images récoltées lors de ses promenades urbaines.

Zoé Léonard (1961-) :

Zoé Léonard est une photographe autodidacte et une militante américaine. Depuis les années 1980, elle allie dans son travail démarche documentaire et conceptuelle. Elle privilégie le noir et blanc dans ses photographies, prises à l’aide d’un vieil appareil argentique. Tout comme Luigi Ghirri et Judith Kakon, elle s’attache à l’idée de la collection d’images. Ses séries se composent d’éléments qu’elle croise au fil de ses déambulations quotidiennes, de ses voyages et de ses activités militantes. Celles-ci sont présentées dans de nombreux musées à l’internationale sous la forme d’installations. Elle s’intéresse au médium photographique en tant que tel. Dans ses images, elle capture différents points de vue de son sujet et elle effectue des interventions de recadrage et d’agencement, amenant ainsi les spectatrices et spectateurs à changer de perspective sur ce qu’elles ou ils regardent dans l’espace d’exposition.

Par exemple, dans son installation Analogue composée de 400 photographies prises entre 1998 et 2006, elle capture des images des vitrines traditionnelles des boutiques de East Village à New-York. Elle suit alors la circulation de certains de leurs produits manufacturés (vêtements usés, publicités jetées, anciens appareils photo Kodak) sur les marchés commerciaux en Afrique, en Europe de l’Est, à Cuba, au Mexique ou encore au Moyen-Orient. À l’image du travail de Judith Kakon, l’artiste met en évidence la circulation des marchandises au sein de la mondialisation et les chaînes de production commerciales mondiales.

Les illuminations de Noël

Histoire

Chaque année, à l’approche de Noël, les rues du monde entier s’illuminent. L’association entre Noël et la lumière existe depuis sa création. À l’origine, la période de Noël était une période de fêtes païennes où l’on célébrait le solstice d’hiver et le retour du soleil, de la lumière. Pour concurrencer ces fêtes, en 354 le pape Libère décide d’instaurer le 25 Décembre comme fête de la naissance du Christ. C’est aussi sur cette période, avant l’expansion du christianisme, que l’on faisait brûler un tronc d’arbre pendant plusieurs jours, durant la fête de Yule pour certains peuples germaniques notamment. Cette tradition a perduré par la suite pour la fête de Noël on l’on brulait une bûche pour assurer de bonnes récoltes pour l’année à venir. Coutume qui se traduit aujourd’hui sous la forme du traditionnel gâteau de Noël.

L’association entre la lumière et l’espace publique existe elle depuis l’antiquité, avec certaines grandes cités romaines et grecs éclairées de lanternes la nuit. Par la suite, au Moyen-âge, les villes n’ont que peu d’éclairages nocturnes. Pour un véritable éclairage public, il faut attendre 1667 à Paris, ville lumière, pour que soient instaurées des lanternes fixes au milieu et aux deux extrémités de chaque rue, puis 1766 pour voir apparaître les premiers réverbères à huile, et enfin 1878 lors de l’exposition universelle pour qu’enfin plusieurs places et avenues de la ville soient dotées d’ampoules électriques.

Concernant les illuminations de Noël, c’est en 1882 que Edward H. Johnson, associé de Thomas Edison, créé la première guirlande électrique. Il fabrique une guirlande de 80 ampoules de différentes couleurs dont il va décorer son sapin. Par la suite, les guirlandes lumineuses seront mises en vente à partir de 1890 et vont peu à peu se diffuser dans les foyers. En 1894 elles orneront pour la première fois le sapin de la maison blanche mais c’est en 1912 que la ville de Boston aura l’idée d’installer des sapins illuminés dans l’espace public. À Rennes, l’opéra a été le premier édifice du patrimoine de la ville à être illuminé. Il faudra attendre les années 60 pour que les éclairages de Noël impulsés par les villes se démocratisent réellement. Ceci se faisant conjointement à la mondialisation, l’augmentation des échanges culturels et la laïcisation des sociétés, la tradition religieuse de Noël se perd et devient petit à petit une fête familiale et profane.

Formes et symboliques

La perte de la tradition religieuse se perçoit aussi dans l’évolution des formes des illuminations. Dès que la technologie l’a permis, les éclairages publics de Noël ont pris des formes religieuses chrétiennes : anges, étoiles, crèches, etc. Mais petit à petit, surtout dans les pays déchristianisés et non-chrétiens, ces formes vont soit perdre leur symbolique religieuse (ex : l’étoile du berger), soit être supplantées par d’autres : Père Noël, cadeaux, etc.

Au-delà de la perte de leur sens religieux, les illuminations électriques ont pris, dès leur début, un caractère commercial mais aussi touristique. Chaque année leur installation est très attendue et créé de l’affluence. Les municipalités inscrivent leurs installations dans des programmes festifs où l’on retrouve généralement le marché de Noël de la ville (celui de Strasbourg par exemple) et d’autres événements.

Depuis 2016, un des parcours proposés par la ville de Rennes s’inscrit dans le thème et la tradition du gui. Chez les Celtes, le gui était une plante sacrée que les druides cueillaient avec des draps blancs pour la fête du solstice d’hiver marquant le retour du soleil et de la lumière. S’embrasser sous le gui était un rite païen. La plante a peu à peu été supplantée par le houx, symbole chrétien, mais le gui et le houx coexistent traditionnellement dans les décorations de Noël. Ces symboles ont été réinterprétés dans les parcours lumineux de la ville et leur diversité témoigne de la mondialisation des échanges culturels et de la laïcisation de la société.

Économie d'énergie

La mondialisation n’est pas le seul phénomène à impacter les installations de Noël. La prise de conscience environnementale débutée depuis le début des années 2000 a influencé les municipalités à faire évoluer leurs illuminations. Les ampoules classiques sont remplacées par des LED et de plus en plus de villes prennent d’autres initiatives en faveur des économies d’énergies : renouvellement régulier des décorations, technologies plus économes, périodes d’installation plus courtes, etc. Par exemple à Rennes en 2022 la municipalité a choisi, en accord avec son plan de sobriété énergétique, de réduire son périmètre d’installation de 34 % et de débuté une semaine plus tard la mise en place de ses éclairages. Elle renouvelle également régulièrement ses illuminations. Celles exposés lors de l’exposition de Judith Kakon ne sont donc pas toutes de la même génération technologique, il y en a même une qui n’a pas encore été accrochée dans l’espace publique.

Chaque année les décorations publiques de Noël suscitent de plus en plus de critique d’un point de vue économique mais aussi écologique. Une estimation de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) indique que les illuminations de Noël peuvent représenter jusqu’à 10 % en moyenne de la consommation électrique annuelle liée à l’éclairage public dans les collectivités locales.

La lumière dans l’art contemporain

Depuis toujours la lumière est constitutive des pratiques artistiques. Depuis l’Égypte ancienne avec ses pyramides, en passant par le moyen-âge et les vitraux des cathédrales, la lumière sert à incarner la présence du divin. Dans les arts visuels et plastiques, la lumière est un élément incontournable. Dans la peinture, des artistes tels que Rembrandt, Vermeer, Caravage, ou Monet ont excellé dans l’imitation des effets de la lumière.    


À la fin du 19e siècle, l’apparition de la lumière artificielle permet l’apparition de la photographie et du cinéma. Cependant c’est dans la première partie du 20e siècle avec l’apparition du néon en 1910, que la lumière va devenir un véritable outil de travail. D’abord pour les publicitaires puis dans l’art. En 1949 Gjon Mili photographie Pablo Picasso dessinant des formes dans le vide à l’aide d’une lampe de poche. En 1951, lors de la 9e Triennale de Milan, l’artiste Lucio Fontana, s’inspirant de ces photographies, réalise une œuvre monumentale en néons blancs « Luce spaziale ». Par la suite de nombreux artistes tels que : Martial Raysse, Joseph Kosutz, Mario Merz, Dan Flavin vont utiliser les néons comme matériaux pour leurs œuvres.

   
Dès le début des années 60, certains artistes utilisent la lumière pour créer des ambiances, des atmosphères qui sont données à vivre, à éprouver, et non plus à juste observer. C’est le cas des environnements immersifs de James Turell ou encore d’Olafur Elliasson avec notamment son œuvre The Weahter Project ((2003)). Aujourd’hui, la lumière artificielle est utilisée de nombreuses manières différentes : pour projeter des ombres (Changements d’humeurs brutaux, Tim Noble & Sue Wester, 2009-2010), pour créer des ambiances lumineuses dans la nature (Bioluminescent, Forest Friedrich van Schoor et Tarek Mawad, 2014), ou même pour créer une œuvre d’art transgénique (GFP Bunny, Alba, Eduardo Kac, 2000 : une lapine génétiquement modifiée pour être fluorescente à la lumière bleue, cette œuvre controversée à amener des débats éthiques sur la vie à l’ère de l’usage des biotechnologies).    


Que ce soit dans les arts visuels, les arts vivants, l’architecture, le cinéma, etc. la lumière, artificielle ou non, est un médium, un paramètre important pour les artistes. Selon la façon dont elle est utilisée, modelée, elle peut susciter de nombreuses émotions : de l’émerveillement à la peur, du calme au tourment…

Dans l’œuvre de Judith Kakon c’est l’absence de lumière qui interpelle le spectateur. Face à des formes que celui-ci connait comme lumineuses et festives, elles sont cette fois en mode veille ou plutôt en mode stockage. Ce n’est donc par la lumière qui amène à émouvoir mais la forme, l’objet. Ceci entraîne également des questionnements sur l’usage et la valeur objet/œuvre, ainsi que sur l’espace d’exposition.

Le Nouveau Réalisme

Dans son exposition Grand Air, Judith Kakon s’intéresse à la fabrication, la circulation et le devenir des objets manufacturés. Comment ces objets du quotidien fabriqués en série, produits de la société de consommation actuelle, peuvent devenir une nouvelle matière artistique, des œuvres d’art uniques dans le contexte d’une exposition ?

Dans les années 1910, Marcel Duchamp a initié la démarche du réemploi d’objets utilitaires en tant qu’objets artistiques avec ses célèbres ready-made. Sa démarche, encore transgressive à cette époque, a ensuite ouvert la voie à de nombreux artistes qui ont cherché eux aussi à puiser dans le quotidien de nouveaux matériaux artistiques.

Au-delà de la réutilisation d’un objet manufacturé ou d’une publicité présentés dans un espace qui ne leur sont pas initialement dédiés, Judith Kakon opérer un détournement qui questionne leurs usages au sein de nos sociétés globalisées, standardisées. Cette réflexion sur la société de consommation et la circulation des objets produits a déjà été portée par des courants artistiques, comme le Pop Art aux États-Unis et le Nouveau Réalisme en France dans les années 1960.

En 1960 en France, Pierre Restany (critique d’art), fonde avec plusieurs artistes le mouvement appelé « Nouveau Réalisme ». Après sa rencontre avec Yves Klein en 1958, il commence à s’intéresser à ces artistes réutilisant des objets du quotidien dans leurs productions, mettant au premier plan dans leurs œuvres des matériaux et des images reflétant la société de consommation, à l’instar des artistes du Pop Art aux États-Unis. Le critique d’art conçoit alors ce terme de « Nouveau Réalisme », souhaitant ancrer le mouvement dans une continuité avec le Réalisme du XIXe siècle, qui prend appui sur la réalité brute et banale du quotidien, avec ce qualificatif de « nouveau », pour situer ce mouvement dans une nouvelle période historique contemporaine régie par la consommation et le capitalisme. En octobre 1960, un collectif d’artistes s’unit aux côtés de Pierre Restany en signant une déclaration commune. Ces artistes sont Yves Klein, Arman, François Dufrêne, Raymond Hains, Martial Raysse, Daniel Spoerri, Jean Tinguely et Jacques de la Villeglé. Un an plus tard, en 1961, ils sont rejoints par César, Mimmo Rotella, Niki de Saint Phalle et Gérard Deschamps. Bien que tous ces artistes possèdent un langage plastique assez différent les uns des autres, ils ont cette caractéristique en commun de travailler autour des objets du réel, ramassés notamment dans les rues de la ville tels des déchets, des objets abandonnés par une société de consommation recherchant toujours plus de nouveauté et de perfection. Pierre Restany qualifiera lui-même cette technique commune de « recyclage poétique du réel urbain, industriel, publicitaire » (Pierre Restany, 60--90. Trente ans de Nouveau Réalisme, édition La Différence, 1990, p.7)).

De 1959 à 1970, Arman, dans ce qu’il appelle lui-même les Accumulations, récupère une grande quantité d’objets identiques assimilés à des déchets, les juxtapose et les entoure de plexiglas.

À partir de 1958, César commence à réaliser ses œuvres les plus célèbres, appelées les Compressions. Il récupère chez un ferrailleur de Gennevilliers des pièces de voitures destinées à être jetées et les compresse en blocs rectangulaires. La maîtrise de cette technique l’amènera à créer le célèbre trophée remis pendant la cérémonie des Césars pour le cinéma en France.

Raymond Hains est affichiste dans le groupe des nouveaux réalistes, aux côtés de Jacques de la Villeglé, François Dufrêne et Mimmo Rotella. À partir de 1949 et avec l’aide de Jacques de la Villeglé, Il récupère des affiches publicitaires abîmées et lacérées dans les rues de Paris pour les exposer telles quelles ou sur des supports comme des panneaux en tôle galvanisée.

Le travail de Judith Kakon pourrait être qualifié de la même manière, « un recyclage poétique du réel urbain et publicitaire ». À travers ses œuvres, elle s’intéresse à la circulation et au devenir des produits de consommation. Par exemple, avec sa série des Disparate images, elle photographie des parapluies cassés qu’elle croise au détour des rues, objet de notre quotidien produit en série, devenant unique au moment où il se brise et par le geste artistique de la capture photographique.

Liens entre Judith Kakon et Allan McCollum

Allan McCollum est un artiste américain né en 1944 à Los Angeles. Il vit et travaille à New-York. Il est associé à ses débuts au mouvement minimaliste puis à partir des années 1980 au mouvement appropriationniste. L’Appropriationnisme est un courant artistique qui a émergé aux États-Unis à la fin des années 1970. Les artistes de ce mouvement interrogent la valeur donnée aux œuvres d’art, leur authenticité et leur originalité. Pour cela, ils se réapproprient des images déjà existantes, des publicités, des œuvres d’art et en proposent une réinterprétation, un nouveau système de valeurs.

Allan McCollum interroge les notions de reproduction et d’original dans l’art. Une œuvre d’art peut-elle être réellement « unique » ? Il crée ainsi des séries d’œuvres à partir d’objets produits en série comme dans les usines. Dans ces séries, les œuvres entre elles vont différer sur des détails (comme la couleur, la dimension ou d’autres aspects formels), ce qui va les rendre uniques.

Il passe par des médiums tels que la sculpture, le dessin ou la photographie pour créer à chaque fois des séries, allant de quelques objets à plusieurs milliers. Tout comme Judith Kakon, il s’intéresse à la fabrication, la circulation et au devenir des objets manufacturés dans notre société de consommation, en réinterrogeant la place de ces objets dans l’espace d’exposition et leur valeur en tant qu’œuvre d’art selon le contexte dans lequel ils se trouvent.

La série des Perfect Vehicles d’Allan McCollum, débutée en 1985. Ces objets, qui ont l’aspect de vases ou d’urnes funéraires, font partie de plusieurs séries exposées par l’artiste dans différents lieux. Bien que possédant une technique sérielle et une esthétique commune, ces œuvres diffèrent les unes des autres par leur couleur, leurs dimensions (selon les séries) ou d’autres infimes détails formels qui les rendent uniques.

Date Series (Medjool) de Judith Kakon représente une série d’œuvres de flacons en forme de dattes réalisée en verre soufflé et exposée dans différents lieux. L’artiste a elle-même conçu les moules de fabrication selon une technique ancestrale utilisée par les romains il y a 2000 ans. Cette méthode artisanale vient contraster avec l’aspect sériel et reproductible de l’œuvre qui questionne son usage artistique au sein de l’espace d’exposition.

 

« Dans un monde sans objets symboliques produits en masse, nous n’aurions guère besoin du concept contraire de l’œuvre unique. Mais dans notre monde, nous travaillons toujours pour protéger l’intégrité de l’unique contre son avilissement par la réplique, pour faire défense contre la menace de plénitude en se retirant dans le réconfort de la pénurie. Mais si nous arrivions à embrasser les mécanismes qui animent nos passions, et à les comprendre avec les passions qui animent nos machines, nous pourrions peut-être alors commencer à chercher un art à la fois répétitif et expressif, à la fois copié et original, à la fois abondant et précieux : un art pour incarner à la fois l’horreur et la promesse de la vie moderne, sans reculer ni l’un ni l’autre. » (Allan McCollum, 1989, traduction, citation originale en anglais sur : http://allanmccollum.net/allanmcnyc/mccollumquotes.html).

Bibliographie jeunesse 1er et 2nd degrés

Cycle 1 

-- Traces de lumière, Olivia Fryszowski, collection Album Dada, éditions Mango jeunesse, 2003.

L’ouvrage propose un abécédaire de lettres formées par différents objets. Les jeux de couleurs et de lumières viennent éclairer les lettres.

-- Le grand bestiaire, collection Imagier, Ateliers Art terre, 2003.

Des animaux créés en différents matériaux de récupération ont chacun été imaginés par un artiste différent qui a détourné des objets pour former des animaux comme un cochon, un gorille, une abeille etc.

-- Parapluie, Benoit Charlat, collection Petit Loulou, École des loisirs, 2020.

Des pingouins trouvent de nouvelles utilités à un parapluie.

-- La Vie Belle, Hervé Coffinières, collection Tête De Lard, Thierry Magnier, 2002.

L’ouvrage suit un triangle rouge qui, en voyageant à travers les pages, forme des mots ou devient le bec d’un oiseau.

-- Le parapluie jaune, Jae-Soo Ryu, collection Petits Mijade, Mijade, 2012.
-- Ling et les êtres mécaniques, Emma Roberts, Gwendal Blondelle, Alice, 2020.
-- C’est chic, Marie Dorléans, Seuil Jeunesse, 2021.

Cycle 2 

-- Tiroirs Secrets, Olivier Thiébaut, Sarbacane, 2008.

15 tiroirs secrets renferment de nombreux objets et leurs histoires.

-- Expériences avec les ombres, Nora Domenichini, collection Croq’sciences, Nathan, 2005.

L’ouvrage propose de réaliser plusieurs expériences avec les ombres et de nombreux défis.

-- Le Parapluie, Ingrid et Dieter Schubert, Mijade, 2022.

Un chien noir accroché à un parapluie rouge voyage à travers le monde.

-- Un p’tit coin de parapluie, Davina Bell, Sarbacane, 2017.

Dans ce récit poétique, le parapluie est un objet sous lequel on se sent protégé, rassuré et aimé.

-- Harper et le parapluie rouge, Cerrie Burnell, Tome 1, collection Mes Premiers Witty, Albin Michel Jeunesse, 2016.

Harper part à la recherche de son chat grâce à son parapluie rouge magique qui lui fait découvrir de nombreux paysages.

Cycle 3

-- Le point levé, Simon Stranger, Bayard jeunesse, 2019.

Ce roman suit une adolescente découvrant la société de consommation et ses méfaits.

-- Interface, Matthew Tobin Anderson, Gallimard jeunesse, 2011.

Ce roman dystopique fait un récit critique de la société de consommation.

-- Tout doit disparaître, Mikaël Ollivier, Thierry Magnier, 2007.

Hugo déménage à Mayotte où il rencontre de nouvelles personnes et découvre une nouvelle culture. En revenant en France métropolitaine, il prend conscience de la surconsommation.

Second degré 

 -- Parapluies, Maria Villa, Insula, 2019.
-- Mon œil, Ariel Kenig, Eric Franceschi, collection Photo Roman, Thierry Magnier, 2007.
-- Derrière le rideau de pluie, Guillaume Le Touzé, Michel Semeniako, collection Photo Roman, Thierry Magnier, 2007.
-- Recto Verso, Ingrid Thobois, Thierry Magnier, 2012.
-- Black Friday, Christophe Léon, collection Rester Vivant, Le Muscadier, 2020.
-- Regarde les lumières mon amour, Annie Ernaux, Folio, 2014.
-- Je consomme donc je suis ?, Benoît Heilbrunn, Quentin Vijoux, collection Decodage, Nathan, 2016.
-- Dans la boîte, Lénaïc Vilain, Delcourt, 2022.

Arte povera

Dans sa pratique artistique, Judith Kakon s’intéresse au réemploi d’objets trouvés ou observés dans l’espace public. À La Criée par exemple, elle a sollicité le service Eclairage public  de la métropole de Rennes, pour réutiliser les lumières de noël et produire son installation Recess and Incline.

Cet intérêt pour les questions de réemploi, de déplacements des formes et des usages, entre l’espace public et l’espace d’exposition trouve un écho dans l’histoire de l’art, avec l’Arte Povera.

L’apparition de ce mouvement en Italie dans les années 1960 correspond à un phénomène international plus vaste, qui se manifeste dans des expériences telles que celles du Land Art, de l’  « Antiform  » ou de l’Art conceptuel. Le terme d’arte povera, « art pauvre », est proposé par le critique d’art Germano Celant en septembre 1967 dans un manifeste. Celui-ci accompagnait l’exposition Arte povera-IM spazio dans une galerie de Gênes, qui réunissait une douzaine d’artistes  : Alighiero Boetti, Luciano Fabro, Jannis Kounellis, Giulio Paolino, Pino Pascali, Emilio Prini, Giovanni Anselmo, Paolo Calzolari, Luciano Fabro, Marisa Merz, Mario Merz, Giuseppe Penone, Michelangelo Pistoletto et Gilberto Zorio.

Les artistes de l’Arte Povera souhaitent défier les stratégies mises en place par l’industrie culturelle et la société de consommation. Ils tentent de se soustraire à la logique de marché, pour que leurs œuvres ne soient pas considérées comme de pur produits. Dès lors, ils tentent de réconcilier nature et culture, en utilisant des matériaux considérés comme pauvres ou de peu de valeur : par exemple, ils juxtaposent des objets manufacturés issus de la société de consommation comme des néons, des miroirs ou des vêtements, avec des matériaux naturels et organiques, comme des plantes, des minéraux, de la terre, du feu ou de l’eau. Les artistes de l’Arte Povera créent des sculptures, des peintures, des installations, des photographies, des vidéos, et développent des performances où le processus de création et le geste artistique priment sur l’objet final. La plupart sont fortement engagés politiquement et choisissent d’intervenir directement dans l’espace public, sortant ainsi du cadre d’exposition de la galerie.

Quelques exemples d’artistes et œuvres de l’Arte Povera, en écho au travail de Judith Kakon : 

Dans les années 1960, Pier Paolo Calzolari réalise des séries d’œuvres hybrides mêlant matériaux naturels (végétaux, minéraux, feu, glace) et matériaux industriels (comme le néon). Il s’intéresse au passage du temps, aux énergies et à la transformation naturelle des matériaux organiques au sein de ses installations.

À partir de 1965-66, Mario Merz réalise des assemblages tridimensionnels appelés « peintures volumétriques », composés d’objets du quotidien manufacturés tels qu’une bouteille, un parapluie ou un imperméable, et les associe à des tubes en néon. Il souhaite sortir du cadre du tableau traditionnel. Le néon est un des objets principaux qui traverse toute sa pratique artistique. Il cherche ainsi à dépasser la fonction première de l’objet utilitaire tel qu’un parapluie et à lui transmettre l’énergie de la lumière du néon, une nouvelle « énergie artistique ».

Les artistes de l’Arte Povera font partie des inspirations de Judith Kakon, pour installation à La Criée.

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