Evariste Richer, « Avaler les cyclones » - Ressources pédagogiques

Biographie

Evariste Richer
né en 1969 à Montpellier
vit et travaille aujourd’hui à Paris

Représenté par la galerie Meessen De Clercq, Bruxelles (BE)

Après avoir obtenu un diplôme à l’école des Beaux-Arts de Grenoble, Evariste Richer poursuit ses études à l’École Nationale d’Arts de Cergy-Pontoise. À partir de 2001, il commence à exposer ses œuvres et en 2007 sa première exposition personnelle voit le jour à la Galerie centre d’art à Noisy Le Sec. Intitulée La Rétine, cette exposition interroge la notion de perception.

Evariste Richer est l’auteur d’une œuvre sensible et poétique qui s’attache à comprendre notre propre univers et les mécanismes qui l’ont généré. En s’emparant des outils de la science et de la culture, telle la météorologie, la téléologie (étude de la finalité de toutes choses), l’astronomie ou la physique, il délimite un territoire d’intervention paradoxalement rigoureux et décalé qui s’appréhende comme une expérimentation du réel. La pratique artistique d’Evariste Richer s’envisage d’abord à travers une méthodologie de travail minutieuse : de l’inventaire exhaustif d’informations de tous types (Le monde rectifié*, ou Principe d’incertitude**), à la régénération de phénomènes naturels((Rayon vert***, La Terrella****…), en passant par la réactivation de techniques anciennes de développement photographique (Nuages au iodure d’argent*****)… Cette grille méthodologique lui donne les moyens d’élaborer une œuvre érudite apte à épuiser son sujet et à le retranscrire à travers un langage plastique ouvert. Chacune de ses pièces semble ainsi répondre à la précédente sous la forme d’un dialogue permanent.

Evariste Richer a exposé dans de multiples lieux, notamment au Centre Pompidou (2011), au Palais de Tokyo ainsi qu’au Grand Palais (2013), au MUDAM Luxembourg (2015), au MUCEM à Marseille (2018) et au Musée du Louvre Lens (2021). Il a été par ailleurs nominé au Prix Marcel Duchamp en 2014.

Avaler les cyclones d’Évariste Richer est la première exposition du cycle artistique Festina Lente (hâte-toi lentement, 2023-2025) de La Criée centre d’art contemporain, auquel l’artiste est associé au sein du comité éditorial de La Revue du même titre.

* Le monde rectifié (2001), avec Dove Allouche, compilation de tous les errata parus dans le monde en 2000.
** Principe d'incertitude (2005), inventaire de tous les satellites artificiels lancés dans l'espace depuis Spoutnik 1 (1957).
*** Rayon vert (2005), reconstitution d'un phénomène atmosphérique rare qui consiste en l'apparition d'un rayon vert parfois lors du coucher du soleil.
**** La Terrella (2002), avec Dove Allouche, machine à génération d'aurores boréales.
***** Nuages au iodure d'argent (2005), développement photographique à partir d'un principe de daguerréotypie

Abécédaire

Ammonite : fossile d’un animal marin dont la coquille est en forme de spirale. Dans l’œuvre "Festina Lente", une ammonite obstrue le porte-voix d’un mégaphone de même diamètre. Apocalypse : évoque la destruction du monde, une grande catastrophe. La notion de fin du monde figure dans plusieurs mythes (mythologie grecque, mythologie nordique) mais aussi dans la Bible ou encore dans le Coran. Ce thème est présent dans l’exposition « Avaler les cyclones », notamment avec l’image du cyclone qui peut évoquer le danger ou les catastrophes naturelles, comme en témoigne l’œuvre « Apocalypse ». Composée d’une pale d’hélicoptère et d’une baguette de direction d’orchestre, elle induit la chute et évoque l’accident. Aquarelle : technique de peinture à l’eau sur un support papier. Il s’agit d’une peinture légère, qui permet de jouer sur des effets de transparence. Cette technique est employée par Evariste Richer pour « Le monde foudroyé », qui s’apparente à une carte du monde colorée et qui contraste par l’utilisation de l’aquarelle, avec la rigueur scientifique d’une carte météorologique.

Catastrophe naturelle : phénomène naturel qui peut être très violent et peut causer beaucoup de dégâts. Elle peut prendre différentes formes telles que les inondations, les séismes, les orages, les cyclones ou encore les éruptions volcaniques. Il en est question par exemple dans l’œuvre Monument à la dernière plume présentée dans l’exposition. Le paratonnerre qui figure dans l’œuvre, évoque la foudre et l’orage. Cartographie : étude et réalisation de carte géographique. Evariste Richer pour son œuvre Le monde foudroyé, cartographie les impacts de foudre en aquarelle. Il s’appuie sur une carte déjà existante, rendant ainsi compte d’une topographie aux motifs abstraits. Cyclone : phénomène météorologique qui survient dans les régions tropicales et qui se caractérise par des pluies importantes et des vents puissants qui se rencontrent pour former une spirale, avec pour centre « l’œil du cyclone ». Le thème du cyclone est très présent dans le travail d’Evariste Richer, comme en témoigne l’œuvre éponyme « Cyclone », composée de plusieurs milliers de dés formant ce même motif. Cercles de Cues : renvoie aux travaux du mathématicien allemand Nicolas de Cues (15e siècle), axés sur la résolution du problème antique de la quadrature du cercle. Ce problème géométrique met en évidence l’incapacité des outils de mesures mathématiques (le compas et la règle) à rendre compte de la perfection. Evariste Richer propose sa résolution du problème à travers une illusion d’optique induite par le support utilisé (des plaques de métal émaillées), sur lequel est dessiné un polygone coloré.

Dérèglements climatiques : conséquences du réchauffement climatique, qui sont données à voir par les nombreux changements en lien avec le climat. Cela peut prendre la forme d’épisodes de sécheresses, mais aussi de pluies de plus en plus nombreuses, ou encore d’un décalage des saisons. Détournement : utiliser un objet d’une autre manière que ce pourquoi il a été inventé. Evariste Richer utilise notamment des objets issus de la vie quotidienne pour leur donner un nouveau sens, comme en témoigne l’œuvre « Festina Lente », qui est l’assemblage d’un mégaphone et d’une ammonite. Ces objets et ce minéral n’étaient pas destinés à leur origine à être une œuvre d’art. Ils le deviennent ainsi par le choix de l’artiste et par leur exposition sur socle et sous verre. Documentaire : film qui présente des êtres vivants, non-vivants ou encore des lieux de manière scientifique et didactique. Anne-Charlotte Finel adopte une démarche proche du documentaire pour tourner sa vidéo « Klopotec ». C’est la seule vidéo de l’exposition où le paysage est contextualisé.

Environnement : ensemble d’éléments naturels qui nous entourent. Évariste Richer invite le spectateur à réfléchir sur sa perception de l’environnement, en abordant des questions en lien avec les dérèglements climatiques.

Géométrie : part des mathématiques qui permet l’étude de l’espace. Dans l’exposition Avaler les cyclones, la géométrie est au centre de l’œuvre « Cercle de Cues #5 », qui évoque un problème mathématique. Si l’image représentée donne l’illusion d’un cercle, il s’agit en réalité d’un polygone, une autre forme géométrique qui possède plusieurs côtés. Géologie : science qui a pour objet l’étude la Terre et qui s’intéresse tout particulièrement aux différents éléments qui la composent, en observant les roches, leur composition et leur répartition. Le travail d’Evariste Richer prend appui sur l’observation des données scientifiques issues de cette discipline, comme en témoigne l’œuvre « Noyau du monde », composée de deux pierres placées dans des mains moulées en plâtre, qui rappellent l’action du géologue.

Hasard : idée de quelque chose d’imprévisible et qui ne se contrôle pas, souvent rattachée à l’image du dé comme étant un jeu de hasard. Histoire : évènement du passé ou fait, récit que l’on raconte. Dans l’exposition, Evariste Richer rend compte de grands récits à travers le choix des titres de ses deux œuvres « Histoire » et « Apocalypse ». D’une part, la grande histoire des Hommes et d’une autre, le mythe de l’Apocalypse.

Installation : agencement, placement de différents objets et œuvres d’art en trois dimensions dans un espace d’exposition qui participe à donner un sens aux œuvres. Dans l’exposition "Avaler les cyclones", Evariste Richer propose plusieurs installations comme par exemple l’œuvre « Cyclone » qui réunit 69750 dés à jouer posés au sol. Interstice : espace ou moment dans un entre-deux, en suspens. L’artiste aime capter ses images dans des espaces entre la ville et la campagne et dans des moments entre le jour et la nuit.

Mobile : Un mobile est composé de plusieurs éléments en suspension, qui peuvent se balancer dans l’espace. Le Monument à la dernière plume, qui est une œuvre en suspension, peut renvoyer à cette image du mobile, jouant entre l’équilibre et le déséquilibre des éléments qui la constituent, entre le paratonnerre et la canne d’aveugle. Météorologie : science axée sur l’étude des phénomènes climatiques et atmosphériques. La météorologie prend une place importante dans le travail d’Évariste Richer, comme il est possible de le voir avec le Monde foudroyé, qui dépeint les impacts de foudre dans le monde. Métrologie : science de la mesure. Ce terme a toute son importance dans l’exposition car, Évariste Richer utilise des outils de mesure dans ses œuvres, comme dans « Apocalypse » et « Histoire », où le crayon de l’architecte incarne la mesure de l’espace et la baguette de direction d’orchestre renvoie quant à elle à la rythmique, à la mesure du temps.

Namacalathus : fossile d’origine animale provenant de Namibie, associé à une autre pierre, la Sphérosidérite, dans l’œuvre « Le Noyau du monde ». Les deux pierres s’emboîtent parfaitement.

Oxymore : Figure de style qui consiste à associer deux mots contradictoires. Il est possible de parler d’oxymore dans l’exposition car l’artiste joue sur des contrastes et des oppositions de sens. Par exemple pour l’œuvre « Festina Lente », Évariste Richer assemble une ammonite et un mégaphone. Ces deux objets présentés ensemble témoignent d’un oxymore, entre le silence imposé par le fossile et le bruit sous-entendu par le mégaphone.

Paysage : représentation d’un lieu à partir d’un point de vue. Par exemple, "Les Promesses", qui sont une série de photographies, prend comme sujet le paysage du parc géologique Zhangye Danxia en Chine, auquel est associé la main de l’artiste tenant une mire de réglage kodak. Ce montage et les couleurs vives qui composent l’œuvre, donnent l’impression d’un camouflage, la mire se confondant avec le paysage. Paratonnerre : dispositif ayant pour objectif de protéger les bâtiments de la foudre lors d’orages. Il est composé d’une ou plusieurs tiges en hauteur, placées le plus souvent sur les toits, elles-mêmes reliées à la terre par un système conducteur. Le paratonnerre apparaît comme un élément clé de l’œuvre « Monument à la dernière plume », et rend compte dans l’exposition de sa grande taille, ce qui crée un effet de déséquilibre avec la canne blanche qui lui est associé sous la forme du mobile.

Sphérosidérite : minéral, variété de sidérite (pierre composée de fer). Dans l’œuvre « Le noyau du monde », cette pierre est associée à un fossile, le Namacalathus. Spirale : motif en forme de courbe hélicoïdale. La spirale est le motif qui apparaît dans l’œuvre "Cyclone". À partir des dés, Evariste Richer tend à reproduire ce motif qui caractérise un cyclone

Le dé comme jeu de hasard

Les dés, objets de jeu et de hasard, apparaissent dès l’Antiquité, au Vème siècle avant JC. Ceux-ci étaient constitués de différentes matières : os, ivoire, bronze, verre ou diverses pierres et étaient pour la plupart numérotés de 1 à 6. Très prisés, les dés possédaient en eux-mêmes, une certaine valeur. L’utilisation du dé introduit dans l’art la notion d’aléatoire. Le hasard et les dés sont intimement liés comme en témoigne le célèbre poème de Mallarmé, intitulé Un coup de dés jamais n’abolira le hasard (1897). Le lancer de dés fait référence à l’imprévisible qui serait d’une certaine manière maitrisée.

La symbolique du dé à jouer offre aux artistes plasticiens un champ des possibles. Comme simple évocation du jeu, ou comme incarnation matérielle de l’aléatoire, le dé manifeste de nombreuses possibilités plastiques. Il peut être perçu comme un élément qui construit une image, à la façon de petits cubes qui pourraient s’imbriquer les uns dans les autres ou tout simplement être juxtaposé, donnant ainsi l’effet d’une mosaïque. Par exemple, les points sur les dés peuvent permettre de rendre compte d’une image, en reprenant le principe du pointillisme. Dans l’exposition Avaler les cyclones, Evariste Richer choisit de représenter l’image d’un cyclone, à l’aide d’une multitude de dés (70000 dés) posés au sol les uns à côté des autres. L’artiste utilise ainsi la plasticité des dés pour proposer un dessin en nuance de blanc et de noir. Si Evariste Richer a choisi d’installer les dés sur une surface plane, d’autres artistes ont fait le choix de s’approprier les dés pour en faire une sculpture en trois-dimension. Dès lors nous pouvons citer l’artiste Tony Cragg qui propose plusieurs sculptures faites à partir de dés. Il s’agit pour cet artiste de ne pas laisser de place au hasard, en choisissant méticuleusement la place de chaque dé, avant de les coller entre eux sur une structure. Par exemple dans la série Secretions, Tony Cragg matérialise des formes organiques grâce à des dés, soigneusement choisis et agencés.

Dans l’exposition actuellement présentée à la Criée, deux œuvres présentent des dés : Cyclone et Métagrêle. Le dé comme jeu de hasard se reflète dans Métagrêle, composée d’une main en plâtre tenant aux creux de la paume six dés, issus d’un prototype de jeu. Ce n’est pas la première fois qu’Évariste Richer présente des œuvres réalisées à partir de dés. En 2020, l’artiste a participé à une exposition intitulée Par Hasard, à la Friche la Belle de Mai de Marseille, où il a présenté l’œuvre Avalanche. Celle-ci ressemble fortement à l’œuvre Cyclone, car elle matérialise elle aussi avec des dés, l’image d’un phénomène naturel, ici, une avalanche. Évariste Richer a également utilisé des dés pour la réalisation de son œuvre Cumulocumulonimbus capillatus incus. Il s’agit d’un cube conçu à partir de 8 000 dés à jouer, posés les uns sur les autres de manière aléatoire. De fait, cette installation n’est jamais reconstruite à l’identique, la part de hasard est indissociable de l’œuvre.

Un parallèle peut se faire entre le travail d’Évariste Richer et l’œuvre Eins. Un. One de Robert Filliou (1984). Cette œuvre est un déploiement au sol de 16 000 dés, qui sont de couleurs, mais surtout de formes différentes. À travers cette œuvre Robert Filliou prend le hasard comme sujet de son œuvre. Si le travail de celui-ci fait écho au Cyclone d’Évariste Richer, il est important de souligner qu’il ne s’agit pas de la même démarche artistique. En effet, dans l’œuvre de Robert Filliou, les dés sont jetés au hasard au milieu d’un cercle en bois. À l’inverse, dans l’œuvre d’Évariste Richer, le hasard est maitrisé car les dés sont triés et ordonnés selon leur valeur. L’artiste prend l’idée de l’aléatoire à contre-pied.

Références :
Robert Filliou, Un coup de dé jamais n’abolira le hasard
Article Correspondances, le hasard dans l’art

Le ready-made

En histoire de l’art, le ready-made renvoie à l’utilisation d’objets manufacturés, de la vie quotidienne qui sont érigés au rang d’œuvre d’art. Le terme de ready-made provient de l’anglais « already made » qui signifie « déjà fait ».

Les ready-made apparaissent dans le premier quart du XXème siècle dans le travail de Marcel Duchamp. En 1913, celui-ci propose son premier ready-made. Il s’agit de la célèbre Roue de bicyclette, qui comme son nom l’indique est une roue de bicyclette posée à l’envers sur un tabouret. À travers cette œuvre Marcel Duchamp s’inscrit dans une volonté de révolutionner l’art du XXème siècle. En effet, la juxtaposition de deux objets qui n’ont rien à voir ensemble pour en faire une œuvre d’art à part entière, questionne la nature même des œuvres et de l’art en général. Les ready-made bouleversent le monde artistique, en instaurant un autre regard sur les œuvres, tout en rompant avec un certain esthétisme de la beauté. Ainsi, ce n’est pas l’objet en lui-même qui est important et qui fait l’œuvre, mais bien le concept dont il découle.

Les ready-made peuvent être très controversés, comme en témoigne le plus célèbre de Marcel Duchamp : Fontaine (1917), qui est un urinoir renversé possédant une simple signature, « R. Mutt » (signature de Marcel Duchamp). Cette œuvre, initialement prévue pour être exposée au premier Salon de la Société des artistes indépendants de New York, a fait scandale. En effet, La Société, en marge des salons officiels, avait pour ambition d’accepter toutes les œuvres proposées, néanmoins, lorsque Marcel Duchamp a soumis cette œuvre sous couvert d’anonymat, un vote a été organisé pour savoir s’il était préférable ou non de l’exposer. La décision prise sera de placer la Fontaine derrière une cloison, au sein de l’exposition.

L’urinoir considéré comme un objet sale et vulgaire a été décrit comme étant une simple provocation de l’artiste, cependant, il faut noter que les œuvres de Marcel Duchamp et de tous les autres artistes qui s’en sont inspirés, ont contribué à une remise en cause de la place des artistes dans le processus de fabrication de l’œuvre.

Aujourd’hui, l’impact du ready-made résonne encore dans l’art contemporain. De nombreux artistes les utilisent. Dans l’exposition Avaler les Cyclones, Evariste Richer propose à travers son œuvre Festina Lente, un ready-made, associant une ammonite à un mégaphone. L’un est un minéral préfabriqué par la nature et l’autre, un objet produit de l’industrie. Ces deux éléments ainsi présentés ensemble, témoignent en un sens d’un oxymore, entre le silence imposé par le fossile et le bruit sous-entendu par le mégaphone. Leur exposition sur un socle et sous-verre, renforce leur caractère d’œuvre d’art.

Les artistes et les nuages

Les nuages fascinent, émerveillent et stimulent notre imaginaire. De différentes formes et couleurs, ces phénomènes météorologiques représentent l’immatérielle, le lointain, la rêverie, mais ils peuvent aussi susciter la peur ou encore le cauchemar. Il existe toute une diversité de nuages, allant du Cumulonimbus au Cirrostratus, en passant par les Nimbostratus. Cette pluralité offre aux artistes une large gamme de représentations possibles.

Simple détail ou sujet de l’œuvre ?
Très souvent représentés dans l’art, notamment en peinture, les nuages sont souvent présents dans les paysages et les scènes d’extérieur. Ils permettent à la fois d’apporter du réalisme aux œuvres, en aidant le spectateur à plonger dans le décor peint. Ceux-ci peuvent aussi être porteurs de symboles, oniriques ou divins.

À l’époque Baroque
Dès la Renaissance, les peintres se plaisent à peindre des nuages. À l’époque Baroque, ceux-ci les utilisent afin de rompre avec les limites des contours. À titre d’exemple, l‘Assomption de la Vierge du Corrège (1526) rend bien compte de cette idée avec la présence de nuages qui viennent brouiller les limites du dôme de la Cathédrale de Parme et jouer avec la perspective, donnant ainsi l’impression que le dôme est ouvert sur l’extérieur, mais surtout qu’il dévoile le sacré.

Époque du Romantisme

Les peintures du Romantisme témoignent quant à elles d’une volonté de donner à voir la nature, de s’approprier celle-ci, comme une source d’inspiration. Les paysages deviennent ainsi à cette époque de véritables sujets. La présence des nuages dans ce genre de peintures, participe à créer une certaine atmosphère, jouant sur les émotions qu’elle suscite. Des œuvres, comme par exemple Fishermen at Sea de William Turner (1796), peuvent témoigner de la place des nuages au sein d’un paysage. En effet cette marine montre une scène nocturne, éclairée par la lumière de la lune, elle-même cachée par les nuages qui composent le ciel. Ces nuages donnent l’impression qu’une tempête se prépare, faisant écho à la mer qui devient houleuse et participe ainsi à assombrir le tableau et à créer un climat d’inquiétude à travers un clair-obscur.

Bien que les nuages dans certaines œuvres prennent l’apparence de simples détails, ils peuvent également être des sujets d’étude à part entière. C’est ainsi que le peintre britannique John Constable s’est spécialisé dans les peintures de paysage, avec comme sujet de prédilection les nuages. Il étudie les nuages en Angleterre, à Hampstead où il devient en quelque sorte un peintre de la météorologie, avec une approche presque scientifique.

Dans l’art contemporain
De nos jours, les nuages et autres phénomènes météorologiques intéressent encore beaucoup les artistes. Les nuages offrent en effet un large éventail de représentations plastiques. Certains artistes jouent justement avec la matérialité de ceux-ci, proposant une œuvre sensible, tout en questionnant également le nuage en tant qu’élément poétique mais aussi scientifique. À titre d’exemple le projet Nimbus de l’artiste Berndnaut Smilde s’inscrit dans cette optique en proposant des sculptures éphémères, de véritables nuages qui prennent place dans différents lieux, à l’aide de fumée et de vapeur d’eau. À travers ce travail, l’artiste joue avec la météorologie en recréant un nuage. Cette démarche fait écho à l’exposition Avaler les Cyclones puisqu’il s’agit aussi pour l’artiste de reconstituer le dessin d’un phénomène naturel, le cyclone. Ce cyclone, matérialisé par les milliers de dés qui le compose, peut être perçu comme un condensé de nuages prenant la forme d’une spirale.

Ce n’est pas la première fois qu’un artiste présente une œuvre en rapport avec les nuages à la Criée. En effet, en 2015, Abraham Pointcheval a exposé son projet de performance, intitulée Études pour marcher sur la canopée nuageuse. Il y présentait son souhait de marcher sur les nuages, suspendu à un hélicoptère en exposant des données climatiques et scientifiques. Il a par ailleurs pu réaliser cette performance quelque temps après et présenter la vidéo de celle-ci à la Biennale de Lyon en 2019.

Références :
Article National Geographic – Cet artiste fait apparaître des nuages dans des lieux inattendus
Article Radio France – Les peintres météorologues : comment attraper les nuages avec un pinceau 

De La Criée au musée des Beaux-Arts

Pour prolonger votre visite de l’exposition Avaler les cyclones, les professeurs-relais vous proposent une sélection d’œuvres présentes au Musée des Beaux-arts de Rennes, en écho au travail d’Evariste Richer : 

Art ancien (1er étage, salle 12)

-- CASANOVA Francesco, Voyageurs surpris par un orage, 1770
-- CASANOVA Francesco, Scène d’ouragan, 1770

Art Cinétique (1er étage, salle 28)

-- DEMARCO Hugo, Circulation, 1960-1991
-- BENTLEY Claude, Positive-négative, noir et blanc, 1968
-- BOTO Martha, Alternances Instantanées, 1970

Art moderne et contemporain (1er étage, salles 31 et 32)

-- HUBER Thomas, Halle, Massgaben II, 2013
-- MORELLET François, Lunatique neonly n°2, 1997
-- MOLNAR Vera, 9 carrés--502, 1990
-- NEMOURS Aurélie, Structure du silence (Binaire ternaire soixante et un carrés), 1987
-- NEMOURS Aurélie, Rythme du millimètre – SB30, 1978

Les visuels sont disponibles sur le portail du Musée des beaux-arts : https://collections.mba.rennes.fr/

Bibliographie / Sitographie

Proposée par le service des publics de La Criée et Rachel Guitton, professeure documentaliste, conseillère-relais pour La Criée centre d’art contemporain

Catalogues Evariste Richer
-- Snow / Slow
-- Modernités Cosmiques catalogue collectif « parcours dans l’imaginaire cosmique d’un siècle de création » avec des œuvres de František Kupka, Antoine Pevsner, Eugen Wiškovský, Max Ernst, Lucio Fontana, Brassaï, Victor Vasarely, Anna-Eva Bergman, Émile Gilioli, Frank Malina, Kumi Sugaï, Jean Dewasne, Stefan Gierowski, Alain Jacquet, Laurent Saksik, Hugues Reip, Évariste Richer, Dove Allouche et Caroline Mesquita. ISBN : 978 2 84975 678 2

Biblio jeunesse
-- Ralentir, Stéphanie Demasse-Pottier, Julia Woignier, Albin Michel, 9782226459909

Poésie
-- L’art des nuages Pierre Dhainaut, Voix D’encre, 978-2-35128-204-5
-- Haïkus des 4 saisons (recueil), Le Seuil, 9782021022933, illustré par Hokusaï
-- Miroirs de la nature, Recueil de Haïkus, Le Seuil, 9782021078282
-- Haïkus du temps présent, Madoka Mayuzumi, Picquier, 9782809703184
-- Parce que l’oiseau, Fabienne Raphoz, 9782714311955

Fiction
-- L’histoire de l’escargot qui découvrit l’importance de la lenteur, Luis Sepulvéda, Ed. Métailié, 9781022601338

Essais
-- Rendre le monde indisponible, Hartmut Rosa, La découverte, 9782348080272
-- La Pluie, le soleil et le vent, une histoire de la sensibilité au temps qu’il fait, Alain Corbin, 9782700704303
-- Apprendre à Ralentir, plaidoyer pour un monde apaisé, Blaise Leclerc, Terre Vivante, coll, Champs d’action, 9782360985845

2 expositions autour de la météo au MUMA – Le Havre
-- Le vent : Cela qui ne peut être peint / Communiqué de Presse
-- Météorologiques : dossier de presse

Podcast
-- Semaine spéciale Art et Nature – 5 épisodes de 5 minutes – 2020 – Radio France

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