encre sur papier contrecollé sur sphère en fibre de verre, diamètre 91,4 cm
Après des études à l’Institut d’art de San Francisco et à l’Université de Californie, Russell Crotty réside aujourd’hui dans les montagnes de Santa Monica à Malibu. Il y a construit un observatoire des astres au sommet d’une colline surplombant l’Océan Pacifique et la ville de Los Angeles.
Depuis longtemps attiré par le dessin et l’astronomie, Russell Crotty concilie ses deux pratiques dans une oeuvre qui prend la forme de grands livres et de sculptures. Ses compositions mêlent paysages terrestres, maritimes et célestes. Elles résultent d’un processus, qui s’attache à la fois à l’idée de « disegno » 1 de la Renaissance et aux postures empiriques des astronomes du XIXème siècle. Leur particularité réside aussi dans l’utilisation courante et insolite du stylo à bille, qui caractérise l’expression de son geste.
Dans la nuit californienne, tandis qu’il observe attentivement les mouvements des étoiles et des planètes, il griffonne de nombreuses notes et dessins. Tous ces éléments mis à plat, il réinvente sur le papier, au gré des circonstances et de l’humeur, des paysages singuliers et vibrants, témoins d’un souvenir, d’une sensation inédite.
Russell Crotty explore plusieurs pratiques questionnant la notion d’échelle et de densité. Dans ses livres, le format qu’il nomme FOV (« a field of view ») traduit les limites de l’oeil du télescope par le biais de dessins circulaires. Il opte aussi pour des réalisations à échelle plus importante, sortes de larges atlas panoramiques, qui figurent une carte de la Lune ou un relief de colline. Cette recherche se prolonge en 2000 par un travail en volume. Des globes en fibres de verre, de dimensions variables et recouverts de papier, représentent autant des pluies d’étoiles ou de météorites que des univers abstraits. Suspendues dans l’espace, ses sphères modélisent en réduction une galaxie. Russell Crotty interprète de façon condensée une énergie universelle, toujours renouvelée, source de vie et de chaos. Le plasticien use aussi de l’écriture. Ses textes, descriptifs ou allusifs, dans ses livres ou sur ses sphères, fonctionnent comme des « bad poetry », jouant à la fois des qualités graphiques et signifiantes des mots. Ils s’articulent avec ses dessins comme des poèmes visuels ou des proses nous rappelant par exemple nos liens avec la nature.
À travers ses installations, Russell Crotty semble s’éloigner des anxiétés sociales et politiques qu’ont pris en charge certains artistes de la côte ouest américaine. À l’agitation bruyante des mégalopoles, il préfère l’observation silencieuse d’espaces sans frontières et leur reformulation dans un monde de rêve, fantasmagorique, qui lui est propre.
courtesy galerie Suzanne Tarasiève, Paris
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Russell Crotty
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