« Il s’agit d’élargir les usages qui sont faits de la photographie. La vue narrative, en plongée, d’une table de café, sur laquelle sont posées des tasses est imprimée en sets de table. Par cette mise en abîme, l’image fait office de trompe-l’œil. Elle est aussi utile, manipulable sans soin particulier, gratuite, consommable et jetable, étant reproduite en très grand nombre. Le grand soin généralement apporté aux photographies est dû à la fragilité, à la vulnérabilité des supports. Les marchés nous habituent à un nombre réduit d’exemplaires. Les sets de table, ici, rompent avec ces traditions et démocratisent le statut de l’image photographique, en exploitant pleinement sa reproductibilité. C’est donc le consommateur, dans ce cas, qui décidera de la vie de l’image. La gratuité possible de l’œuvre, la manière dont celle-ci peut être logiquement matérialisée ou encore dé-localisée par rapport aux contextes traditionnels d’exposition participent du choix de la forme que prendra finalement la photographie. »
Sébastien Reuzé, entretien avec Aurélie Bruhl, Sébastien Reuzé, livret d’exposition, La Criée, centre d’art contemporain, Rennes, 2003