Les œuvres de Gianni Motti sont hors-normes, s’apparentant à une suite d’interventions ponctuelles, le plus souvent hors du milieu de l’art. Il en résulte des propositions artistiques relevant d’actes simples mais radicaux ou d’expositions permettant l’infiltration d’éléments visuels ou de « grains de sable » venant perturber ou surprendre le fonctionnement d’une institution d’art et la réception des oeuvres exposées.
De la mise en scène de sa propre mort en juillet 1989 à la revendication du tremblement de terre de Californie en 1992, Gianni Motti s’improvise en génie du détournement et de l’appropriation des événements du quotidien. Ou encore, en mai 2005, Motti entreprend de descendre dans l’accélérateur de particules du CERN (Centre européen pour la recherche nucléaire) enfoui sous terre et d’une longueur circulaire de vingt sept kilomètres pour y effectuer une marche à pied au nom de l’art qui contrastait sérieusement avec la projection des particules à la vitesse de la lumière.
Pour son exposition à La Criée dans le cadre de la biennale Les Ateliers de Rennes, l’artiste proposera deux œuvres. La première est une installation minimale au sein du centre d’art : plus de dix sept mille pavés non solidaires couvriront la superficie au sol de La Criée. L’absence de jointure composera un sol flottant et conférera une instabilité dans la déambulation des visiteurs. L’œuvre comme le visiteur se tiennent alors sur le fil. Tout à la fois dense, solide mais aussi sobre, précaire et légèrement vacillante, l’installation soulève différents enjeux contemporains tels l’absence d’engagement ou l’incertitude ambiante. Elle questionne aussi la place de l’artiste et celle du centre d’art au sein de la valeur travail. En effet, la démarche artistique de Gianni Motti s’inscrit dans la discussion et le questionnement plutôt que dans la productivité à tout va. Cette installation en est une brillante manifestation : faisant écho aux événements de mai 68, il ne s’agit pas d’une œuvre mémoire ou militante, mais plutôt d’une œuvre-question où l’artiste se joue de pirouettes symboliques et conceptuelles pour réactiver le pouvoir du travail de la pensée critique.
La seconde œuvre est l’activation d’un Gianni Motti Assistant qui déambule dans la ville de Rennes vêtu d’un tee-shirt jaune sur lequel est inscrit en lettres noires « Gianni Motti Assistant ». Il en résulte plusieurs clichés, notamment une image qui sera largement diffusée par voie postale, par dépôt et sur internet. La photographie représente la rencontre physique et textuelle du « Gianni Motti Assistant » et de la « Police Municipale ». Les apparitions des Gianni Motti Assistant(s) aux quatre coins du monde activent la présence de l’artiste sans pour autant dévoiler la mission qui leur est impartie : faire signe, interagir selon le contexte et l’engagement de l’Assistant au sein de cet environnement.